

Pour sauver la planète, faut-il arrêter de vivre dans des maisons individuelles ?
Tiny houses, yourtes, roulottes, cabanes... Autant d’alternatives pour penser différemment notre habitation à une époque où l’immobilier doit se réinventer pour faire face aux enjeux climatiques et sociaux. Alors que 75% des Français rêvent du pavillon avec jardin comme d’un idéal à atteindre, le modèle de maison individuelle est-il vraiment encore en phase avec la société de demain ?
2021 M10 21
Il était difficile de passer à côté des polémiques suscitées par la ministre chargée du Logement, Emmanuelle Wargon, suite à son discours de clôture de l’opération « Habiter la France de demain », le 14 octobre dernier. Une démarche qui avait pour objectif de faire réfléchir à d’autres modèles d’habitats, en accord avec les nouveaux besoins de la population, « afin de faire émerger une vision partagée d’un aménagement “sobre et humaniste”, avec des solutions ».
Le gouvernement veut en finir avec la maison individuelle, un « non-sens écologique, économique et social»
— La Tribune (@LaTribune) October 14, 2021
Le modèle du pavillon avec jardin n'est «plus soutenable» et mène à «une impasse », estime la ministre du Logement Emmanuelle Wargon ➡ https://t.co/Pzk9WSt13R pic.twitter.com/hDRjKQT6GJ
La ministre qualifie la maison individuelle de « non-sens écologique, économique et social », en ajoutant que le « pavillon avec jardin n’est pas soutenable et nous mène à une impasse ». Et si vous aussi, vous rêvez de votre maison avec votre coin de verdure à la campagne, sachez que c’est le cas de trois quarts des Français encore aujourd’hui.
En réponse aux nombreuses réactions, le ministère de la Transition écologique a publié un communiqué de presse au lendemain de cette prise de parole pour nuancer les propos de la ministre. « De nombreux Français rêvent de la maison individuelle, car c’est une promesse de confort, d’espace et de tranquillité. (...) Ils sont aussi en demande de services de proximité. » Des services qui ne sont pas toujours accessibles dans des lotissements en périphérie des villes, ce qui peut renforcer un « sentiment d’exclusion ».
« Il faut donc repenser nos modèles d’urbanisme. »

La maison individuelle est-elle vraiment un « non-sens écologique » ?
Selon un rapport de l’Insee, l’habitat individuel représente 56% des logements en 2019. Puisqu’il est imaginé et conçu pour être à destination d’un unique foyer, il est de fait forcément moins écologique qu’un logement collectif. Que ce soient les ressources utilisées à sa construction ou l’énergie qu’il consomme au quotidien, rien n’est mutualisé.
Ce qui pose particulièrement problème, c’est la place qu’il exige. Car pour répondre à notre envie d’espace, les maisons individuelles s’étalent et entraînent une accélération de l'artificialisation des sols, c’est-à-dire le fait de transformer un sol naturel en aménagements urbains, souvent de façon irréversible. Le ministère de la Transition écologique estime qu’à cause de cet étalement urbain, l’équivalent d’un département de la taille des Yvelines disparaît sous le béton tous les dix ans. Et ces grandes maisons avec jardin entraînent par extension un besoin de s’équiper plus, et donc de consommer davantage.
« L’artificialisation des sols est aujourd’hui l’une des causes premières du changement climatique et de l’érosion de la biodiversité. »
Autre problématique, notamment évoquée par la ministre déléguée au Logement : le modèle de la maison individuelle est lié au modèle de la voiture individuelle. Ces pavillons sont souvent isolés des commerces, des écoles ou des lieux de travail, et exigent donc l’utilisation de la voiture pour les différents déplacements. Ce qui ne va pas dans le sens de la mobilité durable, ou écomobilité, vers laquelle on souhaite tendre.

Réinventer notre logement
Comme a pu le confirmer Emmanuelle Wargon, « il n’est pas question d’en finir avec la maison individuelle ». Plutôt que de partir en guerre contre ce modèle, il faut réfléchir à une façon de le repenser pour le rendre plus adapté aux enjeux actuels. Car il peut prendre d’autres formes que le pavillon avec piscine à la Desperate Housewives.
Ces dernières années, on a vu naître un plus grand intérêt pour les logements alternatifs, qui vont souvent de pair avec une envie de vie minimaliste, plus proche de la nature et en presque auto-suffisance, quand ce n’est pas en réponse à une contrainte économique subie. Yourtes, roulottes, cabanes ou tiny houses, ces habitations individuelles sont pensées pour être plus optimisées et plus flexibles.
Elles sont en général plus respectueuses de l’environnement du fait de leur plus petite taille, car elles nécessitent moins de ressources à la construction et moins d’énergie à l’utilisation. Et grâce à leur structure souvent démontable et mobile, elles évitent une dégradation trop importante du terrain et permettent de remettre facilement le sol à l’état naturel. Pour rester dans cette vision plus responsable, elles peuvent utiliser des matériaux locaux et recyclés, ainsi que des équipements écologiques comme les panneaux solaires ou les cuves de récupération d’eau de pluie.
Cela nous donne matière à réfléchir quant à notre façon d’appréhender et de penser notre habitat futur, pour qu’il soit mieux adapté à nos besoins, mais aussi à ceux du lieu de vie que nous partageons toutes et tous : notre planète.