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En 2050, la Terre comptera 9,7 milliards d’habitants. Une croissance qui pose un problème, car selon l'ONU, 9,9% de la population mondiale ne mangent déjà pas à leur faim. Alors, comment nourrir cette population malgré des terres affaiblies et souffrant de la pollution et du manque d’eau ? Pour beaucoup, l’agroécologie serait LA solution. Avec ses méthodes agricoles respectueuses des sols, elle peut donner autant de nourriture en maintenant une résilience envers les changements climatiques. Au point où ce qui était un corpus de théories scientifiques est devenu un courant militant. Mais revenons à nos champs pour comprendre comment elle fonctionne.
Alors c’est quoi ? Plutôt qu’une définition, voyageons dans le passé, au sortir de la guerre. Celle-ci a laissé deux héritages : d’impressionnants progrès mécaniques et chimiques et... une population victime de pénuries. L’un se mettant au service de l’autre, le monde a connu, au cours des années 50 et 60, une révolution verte qui a fait exploser les rendements des terres exploitées.
Et pour cause, cette politique repose sur l’intensification, en combinant trois piliers : l’usage d’intrants (engrais, produits phytosanitaires), la sélection de variétés de cultures spécifiques et un fort recours à l’irrigation. La révolution a eu les résultats attendus : des volumes de productions globalement en hausse. C’est pourquoi ce modèle été recopié jusque dans les années 90, partout dans le monde, en particulier dans les pays en développement. Pourtant, il est loin d’être sans défaut.
Abondance de biens nuit vachement
D’abord, si la nourriture est produite en profusion, ceux qui la récoltent n’en profitent pas parce qu’ils pratiquent la monoculture, incapable de les nourrir. Cette agriculture n’a pas non plus enrichi les paysans, les intrants ayant considérablement augmenté les coûts de production et créé une dépendance aux semences.
Sous nos pieds, l’agriculture intensive n’a pas non plus fait que des miracles. L’irrigation a dénaturé les nappes phréatiques, dégradé les sols et tué la biodiversité en se limitant à quelques variétés, ce qui a brisé les écosystèmes. C’est face à ces constats que s’est développée l’agroécologie.
Bien plus que du Bio
L'agroécologie, c’est l’application de l’écologie aux techniques agronomes. En d’autres termes, c’est entretenir un écosystème naturel pour le garder pérenne afin d'en tirer les fruits. Ou les légumes, hein... On va alors tout faire pour préserver les ressources naturelles (l’eau en particulier), réduire les pressions sur l’environnement (intrants notamment) et avoir recours à des solutions 100 % naturelles à la place, en réintroduisant une diversité.
En pratique, ça donne quoi ? Plutôt qu'opter pour un pesticide, un paysan va associer deux cultures sur sa parcelle : celle visée (une céréale) et un plant moins intéressant (des féveroles) qui attirera les ravageurs. Ainsi, quand l'insecte se nourrit du substitut, il épargne la céréale. Plutôt qu'un engrais, on va privilégier les fumures organiques et le recyclage de la biomasse. On évite aussi le désherbage mécanique, épargnant les sols.
Des pratiques alternatives comme la biodynamie et la permaculture sont évidemment encouragées. Enfin, l’agroécologie réintroduit la diversification des cultures avec des rotations plus longues.
Il ne s’agit donc pas que d’une production bio, sans intrants mais bien d’une approche systémique dont la nature est le cœur. Et cela change tout : en laissant l'environnement se réguler, on en tire tous les bénéfices et non plus une seule (agri)culture.
Nourrir, et respirer
Ses défenseurs encouragent l’expérimentation de techniques agronomes sur leurs parcelles ainsi qu'une nouvelle approche de la formation : chaque agriculteur constatera ce qui fonctionne ou non sur ses terres, dans son écosystème, laissant les autres en tirer des conclusions sur ce qui pourrait être utilisé sur les leurs.
Transition agricole 💡
— UIPP (@UIPPorg) February 16, 2021
Le gouvernement a annoncé le plan #Écophyto 2, qui a pour ambition d'engager 30 000 exploitations agricoles dans la transition vers l’agroécologie ✅
Retrouver l’ensemble du dispositif ici ⬇️
A l’échelle européenne, une transition vers l’agroécologie serait capable de véritables miracles. S’ils reconnaissent volontiers que la transition est délicate car les premières années conduisent à une baisse de productivité, les spécialistes de l’IDDRI affirment qu’elle pourrait nourrir 530 millions d’européens à horizon 2050.
La terre retrouvant ses capacité naturelles, elle gérerait bien mieux l’absorption des eaux de pluie, limitant les inondations tout en allégeant les nappes phréatiques. Enfin, la diversité des plants, souterrains comme en surface, participerait à fixer 40 % d’émissions de CO2 de mieux qu’actuellement. Et voilà pourquoi le gouvernement s'est fixé comme objectif qu'une « majorité des exploitations [soient] engagées dans l’agroécologie » d'ici 2025.