2022 M06 3
Lors d’un séjour en 2011 dans une réserve naturelle de Bornéo, Topher White réalise que les trois gardes forestiers ne peuvent s’occuper de la protection des animaux tant ils sont constamment accaparés par la lutte contre l’abatage illégal d’arbres. Un jour, l’Américain tombe même sur un homme qui venait de couper un arbre à seulement 100 mètres d’un poste des gardes forestiers. La clameur de la jungle avait couvert les bruits de la tronçonneuse !
Des vieux portables pour sauver la forêt
Dans un monde idéal, tous les gardes forestiers disposeraient de drones et d’images satellites en direct pour surveiller la forêt. Conscient du manque de moyens de la plupart des rangers à travers le monde, Topher White, ingénieur de formation, met alors au point une solution low tech, efficace et pas chère. Celle-ci découle de quelque chose d’inattendu qu’il a découvert à Bornéo et qu’il raconte dans sa conférence TED :
« La grande surprise, et elle est de taille, c’est qu’il y a du réseau dans la forêt ! On peut communiquer par téléphone au milieu de nulle part alors que la route la plus proche est à 100 kilomètres. »
Topher White récupère des vieux smartphones encore fonctionnels et les dote d’un petit logiciel d’analyse de données, de boîtiers étanches et de mini-panneaux solaires pour l’alimentation. Cette balise improvisée, une fois installée au sommet d’un arbre, peut repérer le bruit des tronçonneuses à 1,6 kilomètre à la ronde. Sitôt déclenchée, la balise envoie une alerte sur les téléphones des gardes forestiers qui peuvent intervenir avant le massacre.
Un système déployé dans 22 pays
Après avoir testé avec succès ses balises à Bornéo, Topher White a fondé Rainforest Connection, une startup non-lucrative, pour en produire à plus grande échelle. À ce jour, ces « oreilles » sont déployées dans 37 réserves à travers 22 pays. Soit un total de 144 900 hectares surveillés. Ce système d’alarme improvisé met fin au sentiment d’impunité des trafiquants de bois, explique Topher White à Popular Science.
« La plupart du temps, les bûcherons et autres criminels opèrent en supposant qu'ils ne seront ni repérés ni attrapés. Mais quand ils le sont, cela réduit grandement leur envie de prendre un tel risque. »
Son invention pourrait même être adaptée contre la pèche illégale en mer ou, comme il l’explique à National Geographic, s'appliquer à la lutte contre la grande délinquance :
« Nous recevons beaucoup de demandes d'utilisation à des fins de localisation des coups de feu en zone urbaine. »
L’ingénieur américain souhaite aussi intervenir dans les réserves africaines où ses balises capteraient le bruit des 4x4 et des motos des braconniers. Les éléphants pourraient enfin dormir sur leurs deux oreilles, celles de Topher White veilleraient sur eux.
Crédits photos: Rainforest Connection.