Comme DiCaprio, ne serions-nous pas tous devenus "éco-hypocrites" ?

Surpris en janvier dernier à farnienter sur un super-yacht super polluant, Leonardo DiCaprio a immédiatement été taxé d’ « éco-hypocrite ». Si l’insulte est méritée pour l’acteur (et accessoirement ambassadeur de l’ONU dans la lutte contre le réchauffement climatique), ne traduit-elle pas notre difficulté à recevoir des discours engagés sur l’écologie de la part de personnalités ?
  • L’actrice Emma Watson qui se fait un vol Los Angeles – Londres pour assister à une manif’ contre le réchauffement climatique ? Éco-hypocrite. Le prince William qui crée une bourse pour les initiatives en faveur de l’environnement alors qu’il se déplace principalement en hélicoptère et jet privé ? Éco-hypocrite. La militante Gail Bradbrook, co-fondatrice du mouvement Extinction Rebellion, aperçue au Costa Rica en vacances dans un luxueux resort ? Éco-hypocrite, aussi. La presse et Internet ne laissent plus rien passer aux personnalités engagées pour la cause écolo. Au moindre faux pas, l'insulte tombe.

    Pas de leçon, please

    Dans son speech d’introduction aux Golden Globes 2020, Ricky Gervais implore les futurs.es gagnants.es de nous épargner les sempiternels discours engagés :

    « Vous n’êtes pas en mesure de faire la morale sur quoi que ce soit. Vous ne connaissez rien du monde. La plupart d’entre vous a passé moins de temps à l’école que Greta Thunberg. »

    L’humoriste britannique reproche directement aux principaux intéressés ce que les réseaux sociaux ressassent depuis un moment : marre des donneurs de leçons. Et particulièrement en matière d’écologie.

    Tous éco-hypocrites ?

    S’il est effectivement parfois fatiguant de recevoir des leçons de la part de milliardaires dont l’empreinte carbone annuelle représente 10 fois la votre, l’éco-hypocrisie n’est pas réservée qu’aux célébrités. Comme le rappelle le blogeur écolo Sam Grover :

    « Regardez autour de vous, l'éco-hypocrisie est partout : les végétaliens pointent du doigt les mangeurs de viande alors même qu'ils réservent leurs prochains billets d’avion ; les mangeurs de viande exhortent les gens à ne plus jamais prendre l'avion, même s'ils mangent un hamburger au bœuf juteux ; les défenseurs du vélo et les fanboys de Tesla sont constamment en train de se prendre le bec quelque part sur Twitter. »

    L’auteur explique ensuite que cela ne sert à rien de se chercher des poux pour telle ou telle action « non écolo », car nous vivons dans un système où l’empreinte carbone 0 n’existe pas.

    Éco-compromis

    Est-ce que dénoncer les contradictions (flagrantes) des célébrités engagées en faveur du climat ne serait-il pas un moyen de ne pas s’interroger sur nos propres comportements ou de retarder un peu plus les initiatives personnelles que nous pourrions mettre en place au quotidien ? Taxer les célébrités engagées d’ « éco-hypocrisie » ne ferait-il pas le jeu de ceux et celles pour qui l’écologie n’est juste qu’un truc à la mode un peu enquiquinant ?

    On s’est mis au vélo, mais est-on prêt à raboter notre semaine de vacances pour prendre le train au lieu de l’avion ? On achète du textile bio, mais a-t-on remplacé les tupperwares en plastique de sa cuisine par du verre ? Notre quotidien n’est qu’une succession d’éco-compromission.

    Qu'on le veuille ou non, nous sommes tous devenus éco-hypocrites, un peu. À divers degrés, bien sûr. Le tout, c’est de faire comme Thom Yorke, le leader de Radiohead,, et de le reconnaître :

    « Le truc, c’est que j’ai toujours été engagé dans la lutte contre le réchauffement climatique et comme je dois voyager en avion pour mon métier, alors boum, je suis un hypocrite. Je suis entièrement d’accord, je suis un hypocrite. Mais j’essaye quand même de changer ça, et oui, vous avez raison, je suis un hypocrite. »

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