Se revendiquer écolo et regarder Netflix, est-ce vraiment compatible ?

Alors que la consommation de vidéos sur Internet est de plus en plus importante et les acteurs de la VOD toujours plus nombreux, on a tendance à oublier que binger les épisodes de nos séries préférées a un gros impact sur la planète. À l’heure où les services de vidéo à la demande attirent chaque jour plus de 8 millions d’utilisateurs, est-il vraiment possible de rendre nos usages plus responsables ?
  • « T’as regardé la nouvelle série Netflix ? Moi, j’ai tout bingé en une soirée ». Voilà une conversation qu’il n’est pas rare d’entendre autour d’un verre avec des ami.e.s. Le dernier succès de la plateforme, Squid Game, en est la preuve et ce n’est pas le premier programme de la sorte à faire parler de lui. Ça explique pourquoi un acteur comme Disney a rejoint l’aventure en lançant sa propre offre, sortie en France pendant le premier confinement. Et justement, depuis le début de la crise sanitaire, les chiffres de ces plateformes SVOD ont explosé. En mars 2020, près d’un Français sur deux avait accès à un abonnement payant, selon une étude de l’Hadopi et du CSA.

    Numérique et écologie, deux notions que tout oppose ?

    Mais qui dit augmentation du visionnage, dit également augmentation de la pollution liée au numérique. Parce qu'on a tendance à oublier qu’en naviguant innocemment sur Internet, on contribue à augmenter notre empreinte environnementale. Il n’est pas toujours évident d’imaginer notre impact quand on évolue dans un monde virtuel. Et pourtant, cela implique des choses bien réelles comme les terminaux ou les datacenters, pour ne citer qu’eux.

    Selon une étude de GreenIT.fr, menée par son fondateur Frédéric Bordage, spécialiste du numérique responsable, « l’empreinte écologique de l’univers numérique représente un septième continent, de la taille de 2 à 3 fois la France ». En 2019, c’était déjà près de 4% des gaz à effet de serre (GES) mondiaux, soit plus que le transport aérien civil. Dit comme ça, ça donne à réfléchir. 

    Une consommation dans l’excès à repenser ?

    Quand on sait que pour concevoir un ordinateur de 2 kilos, il faut entre autres 800 kilos de matières premières et 1,5 tonne d’eau, on comprend bien pourquoi le processus de fabrication représente 80% de l’impact environnemental du numérique. Et c’est d’autant plus problématique que nous nous trouvons dans une société où l’obsolescence technologique fait rage, tout autant que l'obsolescence psychologique qui nous pousse à renouveler nos smartphones un peu comme on change de chemise.

    En comparaison, nos usages peuvent n’avoir l’air de rien, mais il serait naïf de ne pas prendre en compte leur impact dans la pollution numérique, surtout quand on imagine ce qu’ils sont amenés à devenir au vu de la croissance foudroyante de l’offre et de la demande. Dans une étude de 2019 du Shift Project, on apprend déjà que la vidéo représente plus de 60% des données qui circulent en ligne et qu’elle génère plus de 300 millions de tonnes de CO2 par an, soit 1% des émissions mondiales des GES. Et parmi toutes ses formes, c’est la vidéo à la demande qui pollue le plus, en tête devant la pornographie et YouTube. 

    Quel espoir pour un streaming plus vert ?

    En 2017 déjà, Greenpeace faisait une pétition contre Netflix pour que la plateforme soit plus écolo, et depuis les choses n’ont pas particulièrement évolué de leur côté. Néanmoins, l’espoir n’est pas totalement perdu quand on voit qu’un géant comme Google utilise aujourd’hui 100% d'énergie renouvelable pour alimenter ses différentes activités.

    En parallèle de ce qui ressemble de plus en plus à une prise de conscience chez les GAFAM, on a vu naître en 2018 une offre de streaming plus engagée, tout droit venue de France : Imago TV. Créée par Nicolas et Felipe, elle se veut être « la plateforme de la transition » qui donne « la meilleure visibilité possible à la création audiovisuelle » inspirante. On y retrouve des contenus qui traitent d’écologie, mais également de santé ou d’économie. En plus d’être accessible à tou.te.s gratuitement et sans abonnement, elle pense son engagement écologique jusqu’à sa diffusion, en s’associant à des hébergeurs éco-conçus comme Wetube qui a pour objectif « de réduire la consommation énergétique de la vidéo en ligne ».

    Une initiative qui peut redonner espoir en un avenir plus vert du streaming vidéo. Et si vous n’y trouvez pas encore vos séries préférées, il est toujours temps de penser autrement sa façon de les consommer, en évitant par exemple de laisser les épisodes s’enchaîner en fond sonore pendant qu’on scrolle sur Instagram.

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