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En cette période de COP26, la neutralité carbone est dans toutes les bouches. Et pour cause, comme le rappelle l’ADEME, pour limiter le réchauffement climatique nettement en dessous de +2°C, il est indispensable de l’atteindre d’ici 2050. Pour rappel, selon la définition du Parlement Européen, elle représente « l’équilibre entre les émissions de carbone et l'absorption du carbone de l'atmosphère par les puits de carbone. » En d’autres termes, c’est le fait de ne pas émettre plus de gaz à effet de serre (GES) que ce qu’on peut en absorber.
NégaWatt a récemment sorti son scénario énergétique 2022 qui prouve qu’un avenir neutre en carbone sans nucléaire est encore possible. Lors de la présentation de cette cinquième édition le 26 octobre dernier, son directeur Stéphane Châtelain insiste sur son ambition de toucher les politiques pour avoir un vrai impact. « On a voulu proposer une véritable feuille de route pour le prochain quinquennat présidentiel pour que cette trajectoire puisse être effective demain sur le terrain. »
Depuis sa création il y a 20 ans, l’association s’appuie sur trois concepts fondateurs : sobriété, efficacité et renouvelables. Son scénario se veut comme un projet de société plus durable et équitable. Dans cette logique, il répond aux 17 objectifs de développement durable (ODD) définis par l’ONU, qui représentent « un socle pertinent pour considérer la diversité des enjeux sociaux, économiques et environnementaux autour des choix de transition énergétique. »
Les objectifs de développement durable définis par l’ONU
Repenser nos modes de vie pour réduire notre consommation d’énergie
Pour arriver à cette neutralité carbone, des actions de sobriété et d’efficacité ont été définies pour permettre une forte réduction des émissions de GES et une baisse drastique de la consommation d’énergie. Premier secteur visé, celui des transports. C'est le premier poste d’émissions de GES en France, notamment à cause de notre dépendance à la voiture individuelle qui représente 80% des kilomètres parcourus, si l'on met de côté la part de l’aérien international.
Les experts insistent sur la nécessité de voir notre mobilité évoluer vers des modes alternatifs (vélo, marche et transports en commun) et des motorisations décarbonées. Ils prônent une augmentation du covoiturage, une baisse de la vitesse sur les routes et une réduction des distances parcourues. Ils misent également sur le développement du réseau ferroviaire pour remplacer le trafic aérien, particulièrement polluant en plus d’être inégalitaire.
Principalement à cause de l’élevage, le secteur de l’agriculture est lui aussi très polluant. La consommation de viande est responsable d’environ 15 % des émissions de GES en France. NégaWatt défend une baisse de 50% de la quantité des protéines animales consommées au profit des protéines végétales. Elle imagine aussi la baisse du gaspillage alimentaire, la suppression de l’importation du soja ou encore le basculement de l’agriculture dite conventionnelle vers l’agriculture biologique et l’agroécologie.
« Il n’y aura pas de transition écologique sans transition sociétale. »
Du côté du bâtiment, qui représente plus de 40% de l’énergie consommée en France, négaWatt invite à généraliser la rénovation énergétique performante, car l’essentiel du parc de 2050 existe déjà. Son objectif est d’atteindre 800 000 rénovations de type « bâtiments basse consommation » en 2030 (contre 33.000 aujourd’hui). Et pour les constructions neuves, il faudrait réduire la part des maisons individuelles pour privilégier le petit collectif.
L’association a également vocation à être « un scénario de relance industrielle vertueuse » par la prise en compte des besoins des populations tout en respectant l’environnement. Cela implique l’utilisation de matériaux biosourcés, le recours à des produits durables et réparables pour la construction, l’augmentation des taux de recyclage du métal, du plastique et du verre ou encore la décarbonation des procédés industriels, notamment dans l’industrie lourde.
L’évolution des sources d’énergie du scénario 2022 © négaWatt
Vers un modèle énergétique 100% renouvelable
Aujourd’hui, la France utilise encore 88% d’énergies primaires non renouvelables et importées. NégaWatt imagine l’éolien comme la première source d’énergie pour 2050. Le parc terrestre serait multiplié par deux par rapport à aujourd’hui. En parallèle, le photovoltaïque connaîtrait lui aussi un développement important. On le retrouverait aussi bien sur des logements individuels que sur des grands bâtiments. Le bois et le biogaz (obtenu par méthanisation à partir de résidus de cultures, de déjections d’élevage ou de biodéchets) seraient aussi des sources d’énergie privilégiées.
L’électricité devrait représenter la moitié de la consommation énergétique primaire totale. Elle serait entièrement issue de sources renouvelables, et de fait, sa production serait variable puisque dépendante des conditions météorologiques, pour l’éolien et le photovoltaïque. Pour répondre à cette problématique, l’électricité pourrait être stockée pendant des périodes de surproduction permettant alors de produire de l’hydrogène et du méthane renouvelables, qui seraient utilisés pour répondre à de nombreux besoins (déplacement, industrie, chauffage…).
Grâce au développement des énergies renouvelables, les énergies fossiles (pétrole, gaz, charbon) pourraient quasiment disparaître en 2050; on ne les utiliserait plus que pour produire certaines matières premières. De même, on peut envisager l’arrêt progressif de la production nucléaire avec la fermeture du dernier réacteur en 2045. Une ambition qui ne semble pas vraiment partagée par Emmanuel Macron qui a récemment annoncé être prêt à investir 1 milliard d’euros d’ici 2030 dans cette filière.
Des impacts positifs au delà de la question énergétique
Avec ce scénario, les Français pourraient connaître de nombreux bénéfices. D’un point de vue général, la santé serait nettement améliorée, notamment grâce à la réduction de la pollution de l’air, aujourd’hui responsable de 50.000 décès prématurés par an. De plus, la pratique du vélo et de la marche à pied, pour remplacer la voiture individuelle, aurait des effets très bénéfiques, au point d’éviter plus de 10 000 décès chaque année.
Cette trajectoire est également synonyme de création de nombreux emplois. L’association estime qu’il y aurait plus de 500.000 emplois créés dans les domaines de la rénovation des bâtiments et des énergies renouvelables. Un travail d’accompagnement et de formation serait à anticiper pour les secteurs qui subiraient à l’inverse des suppressions de postes, comme dans l’industrie automobile.
Pour en savoir plus sur le rapport NégaWatt 2022, c'est par là.