10 court-métrages pour envisager le monde de demain avec optimisme

La vision de notre futur conditionne notre présent et notre capacité à nous adapter aux immenses défis qui nous sont posés. Face à la profusion de fictions dystopiques, quel que soit le medium, il y a urgence à renouveler nos imaginaires. C’est le pari audacieux de ces dix court-métrages justement nommés « On s’adapte » et issus d’un appel à projet lancé par CANAL+, en association avec le CNC et Sparknews. Dix récits d’un futur optimiste, nés d’une collaboration entre scénaristes et scientifiques, qui tentent de créer un imaginaire de la transition écologique et sociale.
  • Vous êtes-vous déjà prêté à l’exercice de penser le futur en tentant d’imaginer une société positive et heureuse ? Difficile d’y projeter quoi que ce soit, tant notre présent anxiogène nous conditionne à imaginer le pire. Tant, nous sommes dépourvus de référentiel. Pourtant, l’humain est une espèce fabulatrice, capable d’imaginer le meilleur comme le pire. Depuis la nuit des temps, nous nous racontons des histoires. Et depuis la nuit des temps, ces histoires influent sur nos trajectoires.

    Nos futurs s’imaginent aujourd’hui

    Vous ne verrez donc pas de cités apocalyptiques ravagées par une attaque nucléaire, ni d’humanoïdes destructeurs ou d’humains s’entretuant pour survivre, non. Dans On s’adapte, on côtoie une civilisation sans voiture à essence qui réapprend la mobilité douce (Bolide), on emménage dans des gratte-ciels végétalisés et autosuffisants (Eden) et on rencontre l’amour durant son service écologique obligatoire, nouveau rite de passage à l’âge adulte (Le Phasme et l’Ortie).

    Pour dépanner nos imaginaires, il est nécessaire de s’extraire des visions catastrophistes, certes jouissives mais en partie responsables de notre incapacité à nous projeter en l’avenir. « Je pense que plus on représente l’effondrement, plus on l’accepte » affirme Pascale Faure, ex-responsable des court-métrages de CANAL+, à l’initiative du projet avec Charlotte Fouillet et Andy Battentier de l’association Parvis. Il ne s’agit pas non plus de plonger tête baissée dans un imaginaire candide et renier l’immensité des défis à relever. Chaque court-métrage est un possible, dont l’écriture a été nourrie aux travaux scientifiques, qui pose les jalons culturels de la transformation écologique et sociale. Plus il y aura de possibles et plus l’envie de se plonger dans un futur souhaitable se fera sentir.

    Impliquer le monde de la recherche dès l’écriture

    Avec le soutien du CNRS, un corpus de contenus en sciences de la nature et en sciences sociales a été constitué, permettant aux réalisateur.ice.s de s’emparer de thématiques écologistes pour initier des idées de récits positifs, concrets et advenables. Articles, conférences, entretiens, les travaux scientifiques, à retrouver sur le site site On s'adapte, fourmillent de sujets. 

    C’est à la suite d’un appel à scénarios lancé juste avant la pandémie que les dix projets ont été sélectionnés par un jury composé de scientifiques et de professionnels du cinéma. Pendant plusieurs semaines, les scripts sont développés, auscultés et passés au crible. Certains détails, comme le climat ou des petites choses du quotidien, nécessitent d’être revus car il n’existe pas encore de réalité tangible. « Le détail va générer un sens et une vision de l’environnement, ça nécessite un décryptage de connaissances scientifiques » nous dit Brigitte Pardo de l’unité court et créations de CANAL+. C’est un double défi, puisqu’il s’agit aussi de lutter contre des automatismes d’écriture : « La sacro-sainte notion de conflit, nécessaire au cinéma et à la dramaturgie pour développer un récit, est à réinventer. C’est une autre manière de raconter les histoires. » précise Stéphane Castang, consultant en scénario.

    Par exemple, dans Z.A.R pour « Zones A Réparer », deux militaires sont chargés de défendre une zone protégée et désertée par l’humain, pour que la biodiversité s’y régénère. Inspiré par le consumérisme des stations balnéaires faisant de la nature une marchandise, le réalisateur Léo Blandino a souhaité mettre en scène la fantaisie tragi-comique de la nature et de la réparation du monde : « J’ai voulu parler pour les vers de terre et les limaces de mer. »

    Dans Carné.e.s, on appréciera la dimension mélancolique du road-trip d’un boucher au chômage depuis qu’une loi interdit la vente de viande. En imaginant une société qui dit stop à la consommation de viande à travers les yeux d’un boucher, le récit questionne notre rapport à l’animal sans culpabiliser les non-végétariens. Et surtout, il dresse un possible qui n'a jusqu'ici jamais eu de représentation. 

    Une démarche de production éco-responsable

    Au-delà de contribuer à la production d’un nouvel imaginaire, l’ambition de cette collection se situe aussi dans son modèle de production. Réflexion sur les matériaux utilisés, les costumes, les modalités de transport des équipes, la nourriture,… Tout y passe, aidé par les conseils en développement durable de Pauline Gil du collectif ET BIM : « On est l’industrie la plus médiatisée, ce qui fait qu’on a un impact sur l’inconscient collectif des gens. » Certaines productions déjà sensibilisées à la démarche n’ont eu qu’à appliquer la charte, pour d’autres ce fut l’occasion de penser différemment le tournage et d’intégrer de nouvelles pratiques qui pourront servir pour de futures productions.  

    Le court-métrage, un terrain d’expérimentation

    À quand un long-métrage de science-fiction ambitieux et populaire, capable de porter les mêmes convictions ? Sûrement pas pour tout de suite, nous confie Brigitte Pardo, mais cette collection est déjà une première étape. « Le court-métrage permet une liberté et une diversité de sujets avec un enjeu économique moindre ». C’est aussi une énergie collective, des rencontres humaines et la possibilité de juxtaposer les sujets pour qu’ils interagissent les uns avec les autres. Finalement, c’est le format idéal pour faire passer des messages. « La petite graine, c’est le court-métrage » lance Pascale Faure. Ne reste plus qu’à attendre que celle-ci germe et bientôt nos dystopies ne seront plus que de lointains fantômes d’une époque où l’humain était paralysé par sa vision de l’avenir.

    Les dix court-métrages de la collection On s’adapte sont disponibles sur myCANAL.

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