Nouvelle-Calédonie tortues requins

Dans ce pays, tortues et requins peuvent prendre un avocat pour les défendre en justice

Une nouvelle loi reconnaît un statut unique à ces animaux qui peuvent être défendus en tant que personnes et non plus seulement comme une espèce. Cerise sur le gâteau, cette innovation est située dans un territoire français : la Nouvelle-Calédonie.
  • Partout dans le monde, tortues et requins sont des espèces marines menacées. D'une part, par la pollution et le réchauffement climatique qui nuisent à leur habitat et empêchent la reproduction, mas aussi par la surpêche qui tue des centaines de milliers de tortues marines chaque année, piégées dans les filets, et décime les requins dont les ailerons seuls se vendent jusqu’à 500 €/kg pour faire des soupes.

    En Nouvelle-Calédonie, leur situation est particulièrement préoccupante : en 60 ans, la population de tortues a décliné de 80 % dans le Pacifique Sud selon les estimations du WWF. Mais cet état d'Océanie a pris les devants et légiféré pour les protéger.

    Objection votre honneur !

    Le 29 juin dernier, la province des îles Loyauté a reconnu aux tortues marines et aux requins le statut de sujets de droits. Au vu de la loi, chaque animal de ces deux espèces est désormais une entité naturelle et non plus une partie d’un élément d'une masse ce qui leur permet d’être défendu juridiquement.

    En cas de non respect de leurs droits, une sanction pénale est prévue, découlant du délit d’écocide ajouté au droit français en 2021 : une peine de prison pouvant atteindre 10 ans et des amendes pouvant aller jusqu’à 4,5 millions d’euros pour ces espèces protégées.

    Mais, surtout, avec cette avancée, leurs droits fondamentaux leur permettent d’être représentées devant la justice par une association agréée de défense de l’environnement qui pourra payer un avocat. Le président de la province des îles Loyauté lui-même peut se proposer pour la défense de ces animaux.

    Légiférer pour la nature

    Ce changement est inscrit dans le Code de l’environnement de ce petit archipel de trois  îles, grâce à une spécificité locale : un droit hybride combinant la loi française au droit néo-calédonien, défendu par des chefs kanak. Ceux-ci ont souhaité, à travers cette décision défendre les animaux totems de l’archipel. Une curiosité juridique, jugeront certain, mais qui n’est pourtant pas la première à ce jour.

    En 2008, en effet, l’Équateur a fait inscrire dans sa constitution, des droits à la Nature. Il y a 6 ans, la Nouvelle-Zélande a, elle, accordé un statut de personne juridique au fleuve Whanganui, comme le souhaitaient les populations maories. Plus que défendre des prédateurs, au rôle crucial dans l’auto-régulation des écosystèmes marins, ou sauvegarder des espèces menacées, ce sont autant de reconnaissance de droits à notre nature, non plus comme une ressource ou un espace mais comme des formes de vie. Et puisqu'un des territoires français a passé le cap, rien n’empêche plus notre État de lui emboîter le pas...

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