Carbone bleu mangrove

Qu'est-ce que le "carbone bleu" (et comment il peut sauver la planète) ?

Si vous pensiez que les forêts étaient les meilleurs puits de carbone au monde, vous avez oublié pourquoi la Terre est la « planète bleue ». Car c’est près de l’eau que tout se joue.
  • Rivières, marais, mers…

    Vous n’y voyez que de l’eau mais tous ces écosystèmes côtiers abritent des végétations précieuses dans la lutte contre le réchauffement climatique. En effet, les sphaignes, les palétuviers, les herbiers, mais aussi le varech et même les micro-algues de ces zones humides ont toutes en commun d’absorber et stocker le dioxyde de carbone aussi bien que n’importe quel arbre. C’est ce qu’on appelle « le carbone bleu ».

    Cette mission de fonctionner comme des puits de carbone, les plantes la remplissent avec une efficacité certaine. Bien que les « zones humides » ne recouvrent que 2 % de la superficie totale des océans de la Terre (soit près de 49 millions d'hectares), on a estimé en 2009 que plus de la moitié (55 %) du carbone dans le monde était capturée par des organismes végétaux marins. De quoi rendre vos arbres verts de jalousie…

    Plus c’est humide, meilleur c’est

    À superficie égale, les zones humides stockent plus de carbone qu’une forêt, et 3 à 5 fois plus vite. Un super-pouvoir qui vient du faible ratio d’oxygène (un frein à la décomposition) de leur environnement. Leur capacité de stockage est estimée à 10 milliards de tonnes de CO2 par an par le think tank Océan & Climat.

    Rien qu’aux États-Unis, les mangroves capturerait chaque année près de 8 millions de tonnes de carbone selon la NOAA, soit ce que rejettent 1,7 million de voitures et camions.

    Vous préférez noyé ou étouffé ?

    Depuis 1970, 35 % des zones humides sur la planète ont disparu sous l’effet des activités humaines. Premiers responsables, l’assèchement des sols et la bétonisation des promoteurs immobiliers signent évidemment la mort de ces écosystèmes. Mais les algues et plantes marines sont aussi attaquées par les nitrates que rejettent l’agriculture intensive et toutes les pollutions acides qui souillent les eaux. L’élévation du niveau de la mer découlant du changement climatique ajoute encore des tensions.

    Comme expliqué plus haut, en plus d’empêcher la mission de capture, les destructions et assèchement ont pour effet de relâcher le carbone stocké. La quantité de CO2 ainsi rejetée dans l'atmosphère par la « déforestation côtière » est estimée à 1,02 milliard de tonnes chaque année. Quasiment la totalité des émissions annuelles du Japon, à titre de comparaison.

    Hélas, par méconnaissance, ces zones humides sont négligées. La plupart des efforts sont concentrés sur le reboisement d’anciennes forêts. Alors que selon l'Union internationnale pour la conservation de la nature (IUCN), si on pouvait diviser par deux la vitesse à laquelle disparaissent les zones humides, les émissions liées au relâchement serait réduites d'autant que ce qu'émet l'Espagne tous les ans.

    Heureusement des ONG (dont Global Nature Foundation) s’activent à faire découvrir cet allié vert et bleu ; elles ont même réussi à faire reconnaître son action en faveur du climat par la Commission européenne ce qui permet de lui attribuer des crédits carbone (un mécanisme de compensation des émissions).

    Agir est facile et immédiatement bénéfique

    Bonne nouvelle, trois pays sur quatre dans le monde possèdent au moins un type d’écosystème humide ; on peut donc envisager qu’une recommandation globale soit largement relayée. Nombre d’entre eux s’activent d’ailleurs déjà : la Chine replante des mangroves, la Corée du Sud déploie une forêt de kelp (comprenant du varech et des microalgues brunes) en ceinture côtière... Et la France n'est pas en reste.

    Les états comprennent aussi que tout investissement sur ces zones engendre des bénéfices écologiques et économiques : la flore marine jouant un rôle de filtre, les milieux humides améliorent la qualité de l’eau environnante de façon naturelle et sans ajouter de centrales de retraitement. Également, cette action va réduire les risques d’inondations – les plantations fonctionnant comme des éponges – et prévenir l'érosion des sols. En clair, écologiquement comme économiquement, le carbone bleu pourrait bien être l’or vert de demain.

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