Une mèche de cheveux vieille de 3000 ans révèle des traces de drogue

Des scientifiques viennent d’obtenir la preuve de consommation de drogue à l’âge du fer. L’analyse toxicologique de l’université de Valladolid, en Espagne, a révélé que le propriétaire d’une mèche de cheveux vieille de 3000 ans a consommé différents stupéfiants pendant une longue période. C’est la première fois qu’une étude fournit la preuve scientifique de l’usage de drogues à la Préhistoire.
  • Des traces de plusieurs plantes contenant des substances psychotropes ont été retrouvées dans une mèche de cheveux de près de 3000 ans. Aucune information pour l’instant sur le propriétaire des cheveux retrouvés dans une petite boite en bois d’olivier composée de trois chambres circulaires et d’un système de fermeture sophistiqué. Seule certitude pour l’équipe de chercheurs, dirigée par Elisa Guerra-Doce, spécialiste des drogues à la Préhistoire (université de Valladolid, Espagne), l’homme ou la femme à qui on les a coupés a consommé de nombreux stupéfiants pendant une période significative.

    WITTE, E. GUERRA-DOCE ET AL / SCI. RAPPORTS 2023

    La petite boite à cheveux a été retrouvée lors de fouilles archéologiques, entamées en 1995, dans la grotte Es Carritx de l'île espagnole de Minorque. Les archéologues y ont également retrouvé plus de 200 tombes humaines, datées d'environ 3 600 à 2 800 ans. Ainsi que des objets cachés dans une petite fosse au fond de la grotte, dont six autres boites en bois, contenant chacune des mèches de cheveux humains. Ce qui laisse penser à des rites chamaniques mortuaires et confirmerait l’hypothèse que dès la préhistoire les sociétés n’autorisaient pas la consommation récréative de drogues. Elles étaient réservées aux rituels mortuaires ou religieux.

    WITTE, E. GUERRA-DOCE ET AL / SCI. RAPPORTS 2023

    Les analyses réalisées par l’équipe d’Elisa Guerra-Doce révèlent la présence de nombreuses plantes locales comme le datura, la mandragore, la jusquiame blanche ou le pin commun. Des plantes riches en atropine et scopolamine qui induisent désorientation, hallucinations et altération des sensations physiques. Mais également d’éphédrine qui stimule l'énergie et la vigilance. Résultat : un cocktail très excitant et potentiellement toxique que seuls les chamans auraient su manipuler et consommer en toute sécurité.

    Mais pourquoi cacher les mèches de cheveux au fond de la grotte ?

    L’hypothèse la plus crédible des chercheurs : la préservation de traditions alors que l’île de Minorque subi de nombreux changements sociaux entre 3 000 et 2 800 ans. Les anciennes sociétés veulent préserver une trace de leur passage malgré les nouveaux arrivants. Les rituels funéraires commençaient par la teinture avec une couleur rougeâtre des mèches de cheveux sur les cadavres et plus tard la coupe de celles-ci pour les mettre dans les petites boites en bois d’olivier placées près des tombes.

    Asome - Universitat de Barcelona

    C’est la première fois qu’une étude scientifique fournit la preuve directe de l’usage de drogues aussi loin dans notre histoire. D'autres analyses capillaires ont déjà révélé que des enfants incas, destinés au sacrifice il y a plus de 500 ans, auraient également ingéré des boissons hallucinogènes, des feuilles de coca et de l'alcool. En revanche, il n’existait jusque-là que des preuves indirectes de la consommation de drogues dans diverses parties du monde, notamment dans les représentations artistiques.

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