Coral Gardeners corail (c) Ryan Borne

A Tahiti, ces surfeurs réparent la barrière de corail en jardinant sous la mer

Les Coral Gardeners cultivent le corail pour le replanter là où l’activité humaine l’a détruit. Leur objectif : en replanter 1 million avant 2025.
  • En Polynésie française, l’économie tourne autour du tourisme, des fermes perlières et de la pêche. Tout un écosystème qui dépend directement de la bonne santé de la barrière de corail locale ; hélas, celle-ci subit de plein fouet le réchauffement climatique. Les canicules augmentent la température marine des eaux déjà affectées par l’acidification due aux rejets de pesticides et au CO2. Le corail perd alors les algues qu’il héberge (les zooxanthelles) et blanchit. Il ne se reproduit plus et devient sensible aux maladies.

    Désolés de constater la disparition des coraux, des jeunes surfeurs des environs de Tahiti ont décidé de donner un coup de main à la nature. Enfin, un coup de râteau plutôt.

    C’est en premier lieu Titouan Bernicot qui a fondé Coral Gardeners en 2017, alors qu’il avait 16 ans. « On est partis surfer avec mon petit frère et quelques amis. On est arrivés au spot et on a réalisé que les récifs coralliens étaient en train de mourir » raconte-t-il à TNTV. Il va alors arrêter ses études et travailler jour et nuit à une solution en s’entourant de pêcheur et de spécialistes. 

    Ils ont sélectionné les coraux les plus résistants au changement climatique et en ont fait des boutures, comme on le ferait pour des fleurs. Puis ils les replantent là où les coraux ont disparu.

    Underwater potager

    Les Coral Gardeners ont lancé leur ferme sous-marine, installée au fond du lagon. Cultivateurs en combinaisons de plongé, ils descendent s’occuper de leurs plants, installés sur des fils comme une vigne 5 mètres sous la surface.

    Il faut entre un an et un an et demi avant de pouvoir replanter une bouture. D’abord aidé de son frère Ioana et de ses amis Taiano et Maoritai, Titouan a tenu à impliquer beaucoup d’acteurs locaux pour que chacun prenne conscience que c’était leur environnement direct qui était touché et qu’on pouvait le réparer. Il a eu raison.

    Cinq ans plus tard, Coral Gardeners implique une trentaine de personnes et a déjà replanté 25 000 coraux. Rien qu’en 2022, ils auront redonné la vie à 15 000 nouveaux pieds. Et le meilleur, c’est qu’ils survivent. « Sur les 16 000 fragments de coraux replantés sur l’île, confie le jeune jardinier à Reporterre, entre 65 et 75 % ont survécu ». 

    Pour survivre, les Coral Gardeners proposent un système de don ou de parrainage où vous couvrez les frais d’entretien d’un corail. Plus de 30 000 personnes ont déjà adopté un de ces plants. De nouvelles fermes ont ouvert dans d’autres atolls et les jardiniers aimeraient maintenant s’étendre hors de la Polynésie, « aux Fidji, au Panama ou encore en Thaïlande ». Des sites qui en ont largement besoin, hélas…

    Blanc is the orange

    En 30 ans, 30 % des coraux ont disparu sur la planète. Alors même que le WWF estime que la moitié de l’oxygène que nous respirons est produit par la vie océanique qui dépend directement des récifs coralliens. Les experts du GIEC ont calculé que même en tenant les accords de Paris et en limitant le réchauffement planétaire à +1,5 °C, 70 % des coraux seraient menacés de disparition. « Sans coraux, pas d’anémones, pas de poissons… » résumait Titouan Bernicot. 

    Ils ont aussi ouvert Coral Gardeners Labs, un centre de recherche qui étudie les coraux jour et nuit par caméras et intelligence artificielle. De quoi faire avancer la science pour mieux les comprendre et les soigner. Un espoir existe bien, puisque des coraux sains ont récemment été découverts sans qu'on sache ce qui les avaient préservé.

    Alors, comme ces jeunes surfeurs, vous pouvez agir en soutenant leur action, en adoptant un corail sur leur site. Une idée cadeau qui réchauffera plus de coeurs qu'une copie du bilan de la COP27.

    Plus d'infos : coralgardeners.org
    Crédit photos : Coral Gardeners (c) / Ryan Borne

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