Les feuilles mortes se ramassent à la pelle... pour faire du papier !

Depuis sa découverte il y a 2.000 ans par les Chinois, il faut du bois et des additifs pour fabriquer du papier. C’est pour éviter la déforestation, les produits chimiques et limiter les émissions de CO2 qu’un jeune ukrainien s’est penché sur des sources alternatives à la production de cellulose. Et ça marche !
  • Malgré l’explosion du numérique, nous consommons toujours beaucoup (trop) de papier selon l’ADEME. Il représente 75 % des déchets du bureau et n’est au final que très peu recyclé. Chaque salarié consomme l’équivalent de 3 ramettes de papier par mois. Sachant que 25 % des documents sont jetés 5 minutes après leur impression. Une aberration pour les forêts ! Alors, il existe des gestes simples à adopter : imprimer seulement si nécessaire et uniquement les parties utiles des documents, opter pour le recto-verso voire plusieurs pages par feuille ou réutiliser les feuilles imprimées sur une seule face comme papier brouillon.

    L’autre solution pour éviter tout gaspillage : le tri. Malheureusement nous trions jusqu’à trois fois moins nos papiers au bureau qu’à la maison ! Pourtant leur recyclage permet de produire un papier d’aussi bonne qualité. Le tout en consommant beaucoup moins d’eau et d’énergie. Le tri des papiers est pourtant une obligation légale depuis 2016 pour les administrations de plus de 20 personnes et les entreprises de plus de 100 salariés. Et puis on peut aller plus loin et agir en amont, dès la fabrication du papier. C’est l’idée d’un jeune ukrainien qui a imaginé un procédé pour transformer les feuilles ramassées dans les parcs et jardins en papier.

    L’idée a germé en 2017 dans la tête de Valentin Frechka alors qu’il n’est âgé que de 16 ans. Cet amoureux des balades en forêts cherche une alternative à l’abattage des arbres pour la production de cellulose. Après de nombreux échecs, avec de la paille ou de l’herbe, en 2018 des tests dans le labo l’Université Taras Shevchenko de Kiev, vont lui confirmer que son hypothèse est viable. On peut fabriquer du papier de bonne qualité de façon écologique et durable avec des feuilles mortes. Un an plus tard, avec son nouvel associé, Alexander Sobolenko et 18.000 euros, Valentin lance son projet et l’entreprise Releaf Paper.

    « Nous débarrassons les feuilles de tout composé solide, les séchons et les granulons. Cela nous permet de stocker les matières premières toute l’année et assure la stabilité du cycle de production »

    Le processus est simple : il s’agit de récupérer les feuilles, les trier, les broyer et en extraire les fibres. Résultat : une pâte de papier durable et résistant. Sans traitement chimique, celui-ci possède en plus une empreinte carbone très réduite. Releaf Paper estime que son innovation limite de 78 % les émissions de CO2, que 17 arbres sont sauvés par tonne de cellulose produite et 15 fois moins d'eau consommée par rapport à la production traditionnelle. Pour l’instant, la société ne fabrique que des sacs, des rouleaux et des boîtes pour les œufs mais elle devrait bientôt se pencher sur les autres types de papier. Et c’est un carton ! Parmi ses clients on compte déjà : l’Oréal, Schneider Electric, Samsung, Weleda ou encore Ariston Thermo.

    Continuer à produire malgré la guerre

    A noter que la start-up de Valentin Frechka ne s’approvisionne pas en forêts, pour ne pas déséquilibrer la biodiversité. Elle récupère les « déchets biologiques » des villes, en gros les feuilles des trottoirs, des parcs et des jardins publics qui sont généralement brulées. Leur pulpe est le parfait substitut de la cellulose du bois. Malgré la guerre en Ukraine, la société, dont le siège est basé à Kiev, a fabriqué plus de 100 tonnes de papier par mois l’année dernière. Et ça, c’est déjà un exploit !