Quand les abris-bus se transforment en refuges pour les abeilles

Après Cardiff, au Pays de Galles, ou Utrecht, aux Pays-Bas, la ville britannique de Leicester vient de décider de végétaliser ses arrêts de bus. Ils sont équipés d'un toit sur lequel poussent des fleurs sauvages et d'autres plantes destinées à attirer les abeilles. Une idée aussi simple que géniale qui contribue aussi largement à la revégétalisation et au rafraichissement de ces métropoles.
  • Les abeilles, comme les autres pollinisateurs, jouent un rôle crucial pour l’équilibre de nos écosystèmes et la biodiversité. Environ 4000 variétés de fruits et légumes n’existeraient pas sans la pollinisation et 75 % de la production mondiale de nourriture dépend des insectes pollinisateurs. Or, partout dans le monde, les abeilles sont menacées par la disparition de leurs habitats naturels, remplacés par des monocultures ou des centres urbains de plus en plus grands. Greenpeace estime que la population d’abeilles a chuté de 25 % en 20 ans en Europe.

    Les usagers patientent, les abeilles butinent

    Pour endiguer cet alarmant déclin, plusieurs métropoles européennes ont décidé de créer un nouvel habitat pour ces pollinisateurs. L’idée est aussi simple que géniale : elle consiste à végétaliser les toits des abribus. C’est Utrecht, la quatrième ville des Pays-Bas, qui a ouvert le bal en 2019, en installant des plants de sedum sur le toit de ses 316 abribus. Ces petits arbustes résistants aux climats secs et froids, offrent des fleurs de mai à octobre. Un régal pour les abeilles, bourdons et autres insectes cherchant un refuge. La municipalité néerlandaise a même poussé le concept plus loin, en équipant ses abribus de bancs en bambou et de lampes à basse consommation. Pendant que les usagers patientent, les abeilles, elles, butinent.

    Un investissement de...zéro euro

    Cet équipement n’a rien coûté à la municipalité. Elle a lancé un appel d’offres et les deux lauréats qui assurent leur maintenance pendant à 20 ans se rémunèrent par la publicité sur les abribus. « Les premiers résultats de l’étude conduite pour évaluer l'impact de ces structures sur la biodiversité sont très encourageants. Ils montrent une augmentation de la population d’abeilles d’environ 12 %, indique le service environnement de la mairie d’Utrecht. Le succès de cette première étape a incité la ville à proposer une aide financière aux propriétaires souhaitant végétaliser leurs toitures. Nous allouons des subventions pouvant atteindre jusqu’à 50% du coût de la végétalisation et là encore, ce programme a rencontré un énorme succès. »

    Ils sont aussi purifiants et rafraîchissants

    En plus d’être bénéfique pour les abeilles, la végétalisation des toits des abribus est aussi un moyen de réduire les émissions de CO2 des villes, car ceux-ci capturent les particules fines. Les "Bee Bus Stops" stockent également l’eau de pluie, contribuent au rafraîchissement en période chaude grâce à l’évaporation ainsi qu’au maintien de la biodiversité en fournissant de la nourriture aux oiseaux et à d’autres insectes.

    Cette initiative a fait des émules. La ville galloise de Cardiff a elle aussi sauté le pas, en végétalisant ses arrêts de bus l’année dernière. La cité britannique de Leicester l’a imitée ce printemps en faisant passer au vert ses 479 abris bus. En plus du sédum, comme à Utrecht, une cinquantaine de fleurs sauvages ont été plantées, qui attirent, en plus des abeilles, certaines espèces de papillons menacées. Cette initiative s'inscrit dans un plus vaste projet mené par Leicester pour stimuler la biodiversité : des fleurs sauvages ont également été semées sur plus de cinq kilomètres de routes et de ronds-points pour transformer la localité britannique en refuge pour pollinisateurs.

    Inspirés par ces réalisations, les habitants de Brighton, la cité balnéaire du sud de l'Angleterre, ont lancé une pétition pour demander l'installation de Bee Bus Stops. En deux semaines, elle a déjà réuni plus de 50.000 signatures.

    Et la France dans tout ça ?

    Lors du renouvellement des 2000 abribus parisiens en 2015, remporté par la société JCDecaux, seuls cinquante d’entre eux (soit 2,5%) ont été végétalisés. Si tous l’étaient, ces spots végétaux équivaudraient pourtant à deux fois la surface des massifs floraux du jardin du Luxembourg.

    Idem à Strasbourg, où la même société a remporté le 10 juin dernier l’appel d’offres pour la remise à neuf de plus de 1300 abris bus et tramways de la métropole. Si 60 abribus seront équipés de ports USB pour faciliter la connectivité en mobilité et d’une pompe à vélo pour encourager la mobilité douce, seuls 6 d’entre eux seront végétalisés. Tout comme à Reims ou Lille où là-encore les abribus végétalisés se comptent sur les droits d’une main lors des contrats récemment signés de remise à neuf des abribus. La solution pour inverser cette tendance, c'est peut-être, comme à Brighton, de lancer des pétitions...

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