Des fourmis qui reniflent le cancer

Une équipe de chercheurs qui réunit des scientifiques du CNRS, de l’Université Sorbonne Paris Nord, de l’Institut Curie et de l’Inserm a mis en évidence la capacité d’une espèce de fourmis à détecter des cancers grâce à son odorat surpuissant.
  • Dressés en moins d’une heure, quelques spécimens de Formica Fusca, l’espèce de fourmis la plus répandue de l’hémisphère Nord ont réussi à flairer des cellules cancéreuses. C’est le résultat d’une étude publiée très récemment dans iScience qui entend creuser cette piste prometteuse pour le diagnostic précoce des tumeurs.

    Pourquoi les tumeurs ont-elles une odeur ?

    Les cellules cancéreuses émettent des composés organiques volatiles (COV), que certains animaux comme les chiens peuvent sentir mais pas l'être humain. Réputés pour la finesse de son odorat, le meilleur ami de l’homme ne parvient toutefois à faire un diagnostic olfactif de cancer qu’à l’issue d’un apprentissage de plusieurs mois donc fastidieux et cher. Face à la première cause de mortalité en France, la détection des cancers de manière efficace et peu coûteuse représente un important enjeu de santé publique. C’est là que Formica Fusca entre en piste, une fourmi connue pour utiliser son puissant odorat dans son quotidien en frottant ses antennes et dotée de capacités d’apprentissage rapide.

    Un apprentissage en deux temps, trois mouvements

    Pendant le confinement, Baptiste Piqueret, l’éthologue, auteur principal de l’étude, a soumis, dans son appartement transformé en laboratoire, des fourmis à des protocoles d’apprentissage associatif qui lie une odeur à une récompense, en l’occurrence un peu de glucose. Bingo ! En quelques minutes et en deux étapes, les insectes ont été conditionnés pour associer au goût du sucre l’odeur spécifique des tissus d’un certain type de cancer. Les tests ont été réalisés avec des cellules humaines saines et des cellules cancéreuses pour tester la capacité des fourmis à les distinguer. Ensuite, l’expérience a été poursuivie plus finement. Après quelques nouveaux entraînements toujours basés sur l’apprentissage associatif, les fourmis renifleuses ont réussi à discerner des cellules de deux sous-types de cancers.

    Un protocole peu onéreux et facile à mettre en place

    Manifestement, le protocole ne nécessite pas de matériel onéreux et il semble très simple à mettre en place puisqu’un peu de sucre, une poignée de fourmis et quelques séances d’apprentissage puis d’entretien permettraient d’obtenir des résultats très probants dans la détection des tumeurs. Ainsi, les tests de dépistage des cancers pourraient être réalisés très rapidement et très efficacement dans les laboratoires et les institutions de santé. Cependant, le CNRS précise dans un communiqué que « l’efficacité de cette méthode doit être évaluée grâce à des tests cliniques sur un organisme humain complet ».
    L’équipe de recherche se concentre à présent à élargir les types de cancers que les insectes pourraient identifier et aussi à trouver d’autres espèces de fourmis qui pourraient renifler les cellules cancéreuses.

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