L'Allemagne veut légaliser le cannabis... bonne ou mauvaise nouvelle pour la France ?

Cet été, pendant que la France énumérait les victimes de règlements de comptes des trafiquants, dans le Sud notamment, l'Allemagne décidait d'en finir avec un projet de loi visant à légaliser la drogue douce. Un exemple à imiter ou une initiative risquée ?
  • Le 24 août dernier, un jeune homme de 18 ans décédait sous les balles à Nîmes, victime des règlements de compte liés au trafic de stupéfiants, comme 3 jours plus tôt, un enfant de 10 ans à Nîmes. À Marseille, les fusillades ont fait 8 victimes… rien qu'au mois d’août.

    Le gouvernement, par la bouche de Sabrina Agresti-Roubache, secrétaire d’État à la Ville, a rappelé sa position : une opposition nette à toute légalisation du cannabis, faisant porter la responsabilité des trafics (donc des morts) aux consommateurs.

    Au même moment, c’est peu dire qu’outre-Rhin on n’était pas sur la même ligne : le 16 août, les ministres allemands ont, eux, approuvé un projet de loi légalisant la consommation de weed.

    Legalisiert Cannabis !

    Très large dans son approche, le projet encadre autant la consommation des particuliers que la culture et bien évidemment la vente. Si la loi est adoptée, chaque Allemand de plus de 18 ans pourra, dès 2025, posséder jusqu'à 25 grammes de cannabis et aura le droit de cultiver 3 plantes maximum chez lui (sans autorisation d’en faire commerce).

    Fumer du cannabis deviendrait alors légal, chez soi comme dans la rue, mais cela restera formellement interdit à moins de 200 mètres d’une école ou d'une association jeunesse, d'une aire de jeux pour enfant et des équipements sportifs. Objectif évident : protéger les mineurs. Une campagne de communication est prévue pour rappeler les dangers de la fumette, notamment en termes d’effets sur le développement du cerveau. 

     

    Enfin, le projet autorise également la création de "Cannabis Social Clubs", soit des associations dont les membres (limités à 500) peuvent venir cultiver des plants et récolter jusqu’à 50 grammes par mois (30 seulement pour les moins de 21 ans).

    Le projet allemand n’est toutefois pas encore adopté ; il devra prochainement passer devant le parlement. S’il est validé, l’Allemagne deviendra le deuxième pays d’Europe (après Malte) à avoir légalisé la consommation de cannabis récréative – puisque l’usage thérapeutique est déjà légal. De quoi tenter la France ?

    Faut-il passer au vert ?

    Il faut être honnête, clamait en août le ministre de la Santé allemand, la consommation de drogue ne cesse de grimper sans qu’aucune réponse ne soit donnée". Son gouvernement cite en fait trois objectifs : endiguer le marché noir (une urgence : les volumes importés depuis le Canada et les Pays-Bas ont été multipliés par 20 entre 2017 et 2018) ; protéger les consommateurs (en particulier les jeunes) ; et freiner la criminalité.

    Man smoking joint (c) Kampus Production

    En France, on estime à 5 millions le nombre de fumeurs réguliers de shit et les gendarmes en ont saisi 125 tonnes en 2022. Le marché (noir) est donc prospère et souffrirait forcément d'une légalisation. Côté criminalité, le projet allemand ne risque pas de créer d' "aspiration" : le tourisme des fumeurs à Amsterdam n'aura pas lieu en Allemagne où l'on ne peut fumer que ce que l'on récolte, et non acheter dans des commerces.

    Une expérimentation équivalente mériterait sans doute d'être lancée. Mais, alors qu’1 Français sur 4 (23 % selon Statista) envisage de prendre du cannabis comme traitement médical et que 44,6 % des Français ont déjà testé du cannabis récréatif dans leur vie (contre 24,5 % des Allemands), le ministre de l'Intérieur persiste à refuser. Alors même que si la loi passe chez nos voisins, les trafiquants auront d'autant plus besoin de se disputer le marché français...

    Crédit photo de Une : Elsa Olofsson

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