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Les défenseurs de la loi contre la maltraitance animale, déposée le 14 décembre 2020, ont eu des sueurs froides... Il faut dire que le texte, adopté en première lecture le 29 janvier 2021, avait été largement amputé.
Après d’âpres négociations, sénateurs et députés se sont mis d’accord le 21 octobre dernier. Cette version définitive sera votée à l’Assemblée le 15 novembre 2021. Mais pourquoi était-il nécessaire de faire cette loi ? Qu’est ce qu’elle va concrètement changer ?
« L’animal-divertissement », la fin d’une ère
La cause animale évolue au fur et à mesure que nous remettons en question notre vision humaniste du monde. En 2012 déjà, l’ONG AnimaNaturalis publiait sur son site internet un article dans lequel 25 neuroscientifiques reconnaissaient l’existence d’une conscience chez les mammifères et les oiseaux.
Il suffit de voir la relation fascinante que le suisse Dean Schneider a créé avec les animaux de son sanctuaire d'Afrique du Sud, Hakuna Mipaka, pour croire dur comme fer à cette théorie.
Quand le grand public découvre que les animaux sont capables de joie, de tristesse ou de douleur, de nombreuses voix s’élèvent pour dénoncer certaines pratiques jusqu’ici jugées normales. Un tigre qui traverse un cerceau en feu, est-ce que c’est vraiment OK ?
Force est de constater que les animaux sauvages ne sont pas faits pour nous divertir et que, pendant des décennies, nous avons privilégié notre plaisir à leur bien-être... Une des mesures phares de cette nouvelle loi contre la maltraitance animale est donc celle qui met fin, dès 2026, au droit de détenir des cétacés en captivité.
En France, deux parcs en possèdent encore : le Marineland d’Antibes et le zoo Planète Sauvage située sur la côte atlantique. Le parc Astérix a, quant à lui, anticipé les choses et fermé ses bassins en février 2021. Petit hic ? Au lieu d’envoyer ses 8 dauphins et 5 otaries dans un sanctuaire, le parc les a fait transférer vers d’autres delphinariums d’Europe...
Autre nouvelle interdiction : la détention d’animaux non domestiques au sein d’établissements itinérants et leur présentation au public. En clair, dès 2023, les cirques français ne pourront plus acquérir de nouveaux animaux sauvages (ou faire se reproduire ceux qu’ils possèdent déjà). En 2028, les spectacles d'animaux sauvages dans les cirques, ce sera de l'histoire ancienne.
La fin de l'exhibition d’animaux sauvages à des fins récréatives est aussi une des mesures retenues par l'Assemblée. Finis donc les montreurs d'ours ou les animaux sauvages sur les plateaux télévisés. Enfin, les fêtes foraines devront désormais se passer des « manèges à poneys ».
Alors oui, on garde un souvenir émerveillé de ce spectacles de félins vu au cirque lorsqu'on était gamin et non, aucun épisode de Skipper le dauphin ne nous a échappé… Mais les choses évoluent, souvent pour le mieux. Saviez-vous que cela fait déjà six ans que la Fédération Vétérinaire Européenne s’est déclarée favorable à la fin des cirques avec animaux sauvages ?
Ours savant faisant du vélo, agence Rol, 1925 © Gallica-BnF
Quant aux delphinariums, une étude menée en 2019 par le Whale Sanctuary Project a démontré que la majorité des décès d’orques détenues en captivité étaient causés par du stress chronique. En même temps, une orque sauvage parcourt en moyenne 160 km par jour. Le plus grand bassin du Marineland d’Antibes, dans lequel ont lieu les spectacles, mesure seulement une soixantaine de mètres.
Elle est tout de même mieux là, non ?
Les chiots et chatons en animalerie, c’est fini
En 2013, les animaleries des quais de la Mégisserie (75001) se retrouvaient dans le collimateur de la justice. Autrefois, on s’y promenait en famille pour s’émerveiller devant les chiots et chatons entassés dans les vitrines… Aujourd’hui, ces animaleries ont toutes cessé leur activité.
La nouvelle loi a justement décidé d’encadrer les achats d’animaux domestiques. Certificat de sensibilisation, identifications obligatoires, fin de la vente d’animaux entre particuliers sur internet… Mais surtout, dès 2024, interdiction pure et simple de vente de chiens et chats en animalerie.
Vous avez mûrement réfléchi et souhaitez avoir un chien ou un chat ? Tournez-vous vers des éleveurs agréés ou adoptez dans un refuge ! Votre futur compagnon à quatre pattes se trouve peut-être parmi les 16 894 animaux recueillis à la SPA entre le 1er mai et le 31 août 2021…
Fermeture du dernier élevage de vison français
Autre victoire encore pour les défenseurs des animaux : l’élevage des visons et autres animaux sauvages uniquement pour leur fourrure est désormais interdit. Dès la promulgation de la loi, le dernier élevage de visons français, installé en Normandie, devra donc fermer ses portes.
Pourquoi si peu de délai ? Avant la pandémie, ils restaient quatre élevages sur le territoire, mais des milliers d’animaux ont été testé positifs au Covid-19 et donc abattus. Rappelez-vous l’année dernière, la sensibilité des mustélidés au virus avait poussé le Danemark à tuer, en prévention, plus de 15 millions de visons d’élevages...
Quand on voit leur bouille, on a du mal à s'imaginer en faire des manteaux... Pourtant, l’importation de fourrure reste légale en France. Heureusement, de plus en plus d’enseignes de mode décident de s’en passer et il existe plusieurs alternatives pour une mode « cruelty free » !
Avec cette nouvelle loi contre la maltraitance des animaux, l’Assemblée va dans le sens de la majorité des français. En effet, selon un sondage IFOP de 2021, 69% d’entre eux considèrent que les politiques ne défendent pas suffisamment bien les animaux.
On est en effet loin de la Suisse, où il est illégal d’interdire à un chien d’aboyer, ou même de la ville de Fair Haven dans le Vermont (USA), qui a élu en mars 2019 son nouveau maire… et c'est une chèvre nommée Lincoln.
Aussi improbable que cela puisse paraître, ça n'est pas le premier animal domestiqué à être élu maire d'une ville américaine... Il y a eu Bosco le labrador croisé rotweiller, Stubbs le chat, Boston Curtis la mule ou encore Giggles le cochon. En France, on est encore loin de ça mais au moins, les choses vont enfin dans le bon sens pour les animaux, qu'ils soient élus ou pas.