2021 M05 14
La scène se passe dans une commission du Sénat en octobre 2020. Interrogé sur l’impact environnemental de la marque à la pomme dont les tablettes, téléphones et autres produits s’empilent dans les déchetteries, Clément Lelong, un représentant d'Apple France annonce la volonté d’« éliminer notre dépendance à l'exploitation minière ». Une urgence écologique ET sociale pour le secteur puisque l’extraction minière du cobalt, du lithium, etc, pollue lourdement et reste majoritairement réalisée dans des conditions amorales et éthiquement condamnables.
Audition ce matin au @Senat des géants du numérique @Apple et @GoogleFR sur l’impact environnemental de leurs activités et l’impérative nécessité de trouver des solutions pour réduire celui-ci.#GAFA #environnement #numérique pic.twitter.com/PNM6GKlYva
— Denise Saint-Pé (@DeniseSaintPe) October 21, 2020
Travail d’enfants, salaires minimalistes… les mines sont des camps d’esclavage qui ne disent pas leur nom. Le tout dans des contextes géopolitiques tendus. Pour ne rien aider, cette activité a un coût environnemental maximal. Il faut par exemple 2600 litres d'eau pour obtenir 1 gramme de ces indispensables métaux. Face à la demande exponentielle d’appareils, la production de ce qu’on appelle les « terres rares » a pratiquement triplé en 25 ans. Seul échappatoire, récupérer les métaux déjà extraits qui dorment dans nos appareils.
Pomme Z sur l’environnement
Depuis 2017, Apple affirme travailler sur une chaîne d’approvisionnement en boucle fermée afin de pouvoir fabriquer des produits « n'utilisant que des matériaux recyclés ou renouvelables ». Les soudures en étain recyclées mis à part, ce n’est hélas toujours pas d’actualité. Et pourtant, les GAFA en ont désormais la possibilité. Car on sait aujourd’hui extraire et recycler les métaux rares.
« Recycler les métaux rares, c’est émettre 1000 fois moins de CO2 et économiser des centaines de litres d’eau. »
Depuis 2008, la société Morphosis revalorise ainsi les vieux smartphones des Français. « Après les avoir démontés et broyés, décrit son fondateur, Serge Kimbel au Parisien, nous récupérons principalement sous forme d'anodes, de sels ou solubles ces métaux précieux et rares ». Une activité en plein boom puisque la loi française oblige désormais les opérateurs téléphoniques (Orange, Free…) à collecter les anciens appareils dans ses magasins.
Loin de s’arrêter là, Serge Kimbel a lancé une seconde entreprise en 2019 à vocation industrielle : WEEECycling, un nom découlant du sigle international des déchets électroniques « Waste Electronic and Electrical Equipment ». Depuis son centre de traitement en Seine-Maritime, la société récupère les rebuts de production des entreprises afin d’extraire les métaux fins « même à l’état de trace » avant de les revendre. Résultat des courses, comparé à l’exploitation minière, WEEECycling affirme générer 1000 fois moins d'émissions carbone et nécessiter 200 fois moins d’eau.
Transformer en or nos déchets électroniques, quelle idée de génie!
— Franck Riester (@franckriester) January 8, 2021
Une transformation vertueuse orchestrée par cette belle pépite qu’est #Weeecycling: recycler et valoriser ♻️
C’est l’avenir et c’est en 🇫🇷. pic.twitter.com/HKtxffQkLZ
Cobalt, lithium, platine… tous valent de l’or
Un marché juteux puisque nos appareils contiennent une cinquantaine de métaux différents. Et le recyclage se révèle plus que rentable : il faut extraire une tonne de minerai aurifère pour récupérer 5 grammes d’or alors que, d’après l’ADEME, on peut en trouver 200 grammes (!!!) dans une décharge d’appareils électroniques. WEEECycling trouve des clients dans tous les secteurs, de l’électronique à la pharmaceutique ou encore dans l’aéronautique.
Serge Kimbel lorgne vers le marché de demain, celui des voitures électriques gourmand en terres rares. Mais hélas, les industriels traînent les pieds : « Les entreprises hésitent souvent à modifier leurs procédés » explique-t-il à La Tribune. N’empêche que ce système a démontré sa compétitivité et ses bienfaits écologiques. Ne manque qu’une loi qui motiverait les usines à préférer les métaux issus du recyclage, ou une politique d’incitation à mieux recycler nos appareils pour que la filière soit encore moins chère. Car les Français préfèrent encore trop leur poubelle que les centres de tri ; malgré l’or caché à l’intérieur, à peine 10 % des téléphones sont recyclés. Si on leur rachetait au prix de l'or, nul doute que les citoyens seraient plus à l’écoute...