Dans ce village déconnecté, les téléphones portables et le Wi-Fi sont interdits

Un endroit sans téléphone portable, sans Wi-Fi et même sans micro-ondes ? Bienvenue à Green Bank, aux Etats-Unis ! À l’heure de la 5G et du tout numérique, difficile d’imaginer que ce village résiste encore (et toujours) à l’envahisseur digital. La raison ? La présence du plus grand radiotélescope orientable du monde.
  • S’il y a bien une bourgade où vous ne serez pas dérangés par les « ting », les « ding » ou toute autre notification de votre smartphone, c’est à Green Bank. Dans ce petit village de Virginie-Occidentale, aux États-Unis, les sifflements qu’on entend sont bel et bien ceux des oiseaux. Et pour cause, il abrite depuis plus de soixante ans un observatoire qui a besoin d’un silence radio total pour observer les étoiles et les trous noirs sans interférence.

    Le gouvernement américain a donc créé en 1958 une « National Radio Quiet Zone », rendant impossible l’installation d’un réseau téléphonique (ou 4G, aujourd'hui). Les ondes radio sont ainsi limitées et encadrées sur un territoire de presque 34 000 km² pour protéger les activités du Green Bank Telescope (GBT). Wi-Fi, téléphones portables, télécommandes et même micro-ondes : tout ce qui produit une onde radio et qui peut potentiellement provoquer une interférence est limité, voire interdit, dans un rayon de seize kilomètres autour du radiotélescope. C’est ce qui lui permet de détecter les plus faibles signaux de l'univers.

    Pour Yvonne Wallech, habitante de Green Bank, cela « a un côté purifiant ». Elle peut profiter d’internet chez elle, mais dès qu’elle quitte sa maison, elle ne reçoit plus aucun appel, ni aucune notification, et « cela éclaircit les idées », assure cette femme de 59 ans, propriétaire d’un magasin de souvenirs, à l’AFP.

    L’argument touristique de la digital detox

    Cette obligation gouvernementale est aujourd’hui devenue une force pour l’office du tourisme de cette commune de moins de 200 habitants, qui y a vu une opportunité d’attirer une population épuisée par cette omniprésence d'internet, en leur promettant une « détox numérique ultime ».

    À une époque où l'on compte 5,27 milliards d’utilisateurs du téléphone portable pour 7,87 milliards d’individus sur la planète et « où vous ne pouvez pas passer plus d'une minute sans entendre un appareil électronique biper, c'est l'endroit idéal pour échapper à tout ça », comme le souligne Chelsea Ruby, la secrétaire au Tourisme de l'État de Virginie-Occidentale, citée par l'AFP.

    Et cette séduisante promesse attire plus d’un touriste dans le comté de Pocahontas, où se trouve Green Bank. C’est le cas de Nancy Showalter, une retraitée de 78 ans en visite à l'observatoire. Elle a d’abord été surprise de ne plus rien capter sur son téléphone, avant de se rendre compte qu’elle s’était rapidement habituée à ce silence.

    « Vous regardez autour de vous, vous écoutez les autres. C'est merveilleux. Davantage de gens devraient le faire. »

    Un village qui fait de la résistance, mais pour combien de temps ?

    Le développement du tourisme entraîne avec lui des changements qui viennent impacter cette petite commune et la heurter aux réalités actuelles. Construction de restaurants et d’hôtels ou arrivée de nouveaux résidents, ces mutations risquent de mettre en évidence les limites de ces interdictions. Certains habitants reconnaissent d’ailleurs que l’internet sans fil s’est immiscé petit à petit dans les foyers ces dernières années, même s’il est censé être interdit.

    Si certains d’entre eux aimeraient voir Green Bank évoluer, notamment car ils jugent cette absence de connexion dangereuse, d’autres espèrent ne rien voir changer, comme Ned Dougherty qui a récemment emménagé pour « trouver un coin plus calme, sans wifi ». Et s’il affirme que « tout le monde espère trouver ici un Eldorado de la quiétude », il est réaliste sur le fait que cela dépend plus de sa propre volonté que de son code postal. « Si je veux me déconnecter, je dois le faire moi-même. Et je pense qu’on a tous conscience qu’on devrait le faire ». À méditer donc !

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