2023 M02 10
Kigali, capitale vibrante du Rwanda, n'apparaît jamais dans les listes des villes les plus écolos. Pourtant, aujourd'hui, la capitale rwandaise ne cesse de faire parler d'elle. Elle a su surmonter son triste passé et devenir une ville attrayante... et verte. Parce qu'elle a fait de l'écologie sa priorité, Kigali a même détrôné Nairobi (Kenya), au rang de ville la plus propre d'Afrique. Une distinction que l'ONU-Habitat lui a décernée pour la première fois en 2013. Les ressources humaines des Nations Unies classent même Kigali au même niveau que les grandes métropoles occidentales, en termes de confort de vie. Il serait "presque comparable à celui de New York".
Un modèle environnemental
Construite sur plusieurs collines, Kigali n'a pas toujours été une capitale verte. Il faut dire que son passé est loin d'être rose… Le 6 avril 1994, la ville fut le théâtre d'un attentat contre l'avion du président Juvénal Habyarimana. Cette attaque a été l'événement déclencheur du génocide des Tutsis au Rwanda. Une guerre civile qui a coûté la vie à 800 000 personnes, dont 300 000 dans la capitale. Mais 30 ans plus tard, Kigali a, tel un phœnix, renaît de ses cendres. Aujourd'hui, en plus d'être une ville dynamique, elle fait figure de modèle en matière environnementale sur le continent africain.
Kigali en janvier 2020 © Reagan M. / Unsplash
Durant la COP27, qui s'est tenue en novembre 2022 en Égypte, l'aide financière à l'Afrique a été définie comme un enjeu majeur dans la lutte contre le réchauffement climatique. La France a rappelé, durant la conférence de Charm el-Cheikh, qu’elle mobilisera 1 milliard d’euros pour aider l’Afrique du Sud à sortir du charbon. Or, le Rwanda, petit pays enclavé d'Afrique de l'Est, est le premier pays africain à aligner son action climatique sur l'accord de Paris.
En avril 2020, alors que l'épidémie de Covid battait son plein, a eu lieu en visioconférence la 11e réunion du Dialogue de Petersberg. Là, Jeanne d’Arc Mujawamariya, ministre de l’Environnement du Rwanda, invitait les gouvernements à : « résister à la tentation de revenir vers les énergies polluantes pour créer des emplois ». Au journal Le Monde, Yamide Dagnet, directrice des programmes climat du World Ressources Institute affirmait :
« Le Rwanda fait preuve d’un réel volontarisme. Depuis 2015, un travail de fond a été mené pour que le pays et l’ensemble des administrations s’approprient l’enjeu climatique »
Un effort commun et des projets ambitieux
Perchée à 1500 mètres d'altitude, Kigali est entourée de forêts et de collines. Mais la politique écologique ambitieuse de la ville se découvre aussi en centre-ville. La propreté de Kigali est souvent comparée à celle des villes suisses… On surnomme d'ailleurs la ville « la petite Suisse ». Et cette propreté, elle a un prix ! 10 à 100 euros d'amende pour un déchet jeté au sol. Les contrevenants peuvent même faire des travaux d'intérêt général. Mise en avant des mobilités douces avec service de vélos en libre-service et « journées sans voiture »... La municipalité agit et sensibilise grâce à de nombreuses campagnes faites dans les écoles et les entreprises de la ville.
Pour devenir la ville la plus écologique du continent africain, Kigali a eu une bonne idée : impliquer au maximum les habitants dans la préservation de l'environnement. Une journée nationale de nettoyage obligatoire, appelée « Umuganda », a lieu le dernier samedi de chaque mois. Ce jour est inscrit dans la Constitution depuis 2007. Durant une matinée, les habitants de 18 ans à 65 ans se réunissent et ramassent les déchets, plantent des arbres ou concrétisent des projets d'utilité publique.
Wakanda Forever
Le Rwanda veut faire de Kigali une sorte de « Silicon Valley » africaine. Après la Cité de l’innovation multifonctionnelle de Kigali (les travaux ont débuté en 2018), et le Centre financier international de Kigali, un nouveau projet vient d'être lancé : une ville 100 % durable. Retardé par la pandémie de Covid, « Green City Kigali » devrait abriter plusieurs milliers de logements construits à partir de matériaux durables locaux. Cette nouvelle ville écologique sera alimentée par l’énergie solaire et le biogaz. Un système de collecte des eaux usées et pluviales sera mis en place, les forêts urbaines seront préservées et les mobilités seront 100 % douces.
Ce projet ambitieux à 5 millions de dollars a été rebaptisé par les locaux « Wakanda », en référence au blockbuster américain de la saga Marvel, Black Panther. Il verra le jour sur une aire de 620 hectares, dans la banlieue de Kinyinya Hill, dans le district de Gasabo. En 2019 déjà, le gouvernement rwandais promettait que la construction de n'entrainerait aucune délocalisation. L'idée ? Laisser les habitants d'origine rester, mais leur apprendre à mieux vivre. Un exemple qu'on pourrait toutes et tous suivre.