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La dernière sélection de l’ESA pour devenir astronaute remontait à 2009 et avait permis le recrutement de Thomas Pesquet, désormais gloire nationale mise sur orbite. Autant dire que la nouvelle campagne, lancée en 2021 et qui récolta 22 589 candidatures, était attentivement scrutée. Cocorico, la lieutenante-colonelle Sophie Adenot devient, à 41 ans la deuxième femme française astronaute, après Claudie Haigneré (et la onzième astronaute française), à obtenir un ticket pour l’espace. Et surtout, l’équipe est composée pour la première fois de l’histoire d’une personne en situation de handicap !
Des stades aux étoiles
A l’été 2000, John McFall a 19 ans et se paie du bon temps en Thaïlande. Alors qu’il visite l’île de Koh Samui en moto, il perd le contrôle dans un virage. Il est envoyé en urgence dans un hôpital de Bangkok où sa jambe droite doit être amputée. L’épreuve est terrible pour ce passionné de course et d’escalade. Mais après de long mois de rééducation, le jeune homme se lance dans la course paralympique et moissonne les médailles dont le bronze aux JO de Pékin en 2008. L’année suivante, il fait ses adieux aux stades pour rejoindre les bancs de la fac de médecine où sort diplômé cinq ans plus tard.
Quand, en 2021, l’ESA annonce chercher des personnes en situation de handicap (au niveau des membres inférieurs, spécifiait l’Agence) pour former des « parastronautes », John McFall tente sa chance :
« Je me suis dit que je serais un très bon candidat pour aider l'ESA à répondre à la question qu'elle se posait : Pouvons-nous envoyer une personne souffrant d'un handicap physique dans l'espace ? »
Et ce passionné de sciences est finalement choisi parmi les 256 candidats handicapés.
Rendre l’espace accessible aux handicapé.es
Certes, l’apesanteur rend tout le monde égaux dans l’espace. Mais les programmes d’entraînement, les fusées et la station ISS ont jusqu’alors toujours été conçus uniquement pour des personnes valides. L’ESA a donc débloqué un budget d’1 million d’euros pour le « programme parastronaute ». La mission de John McFall, ces prochaines années, sera d’aider au développement d’outils et d’ajustements techniques permettant d’envoyer un jour dans l’espace une personne handicapée : peut-être lui, qui sait ?
L’ESA, précise Guillaume Weerts, responsable de la gestion du centre des astronautes européens, est tout à fait consciente que la situation de John McFall est une parmi tant d’autre et qu’en matière de handicap, tout se joue au cas par cas :
« A chaque handicap correspond un certain nombre de problématiques, notamment en termes de sécurité et d'adaptation aux tâches exécutées par un astronaute. »
Mais cette initiative demeure un changement de paradigme dans l’exploration spatiale : fini le validisme, tout le monde a le droit à l’espace. Interrogé par l’AFP, le directeur général de l'organisation caritative britannique Disability Rights UK, Kamran Mallick, se félicite du projet :
« Si nous voulons vraiment explorer l'Univers, nous devons accepter qu'il ne peut pas être réservé à un groupe d'individus. »
Selon l’ESA, un.e parastronaute pourrait s’envoler pour l’orbite basse dans les dix prochaines années à venir. Ensuite, comme dirait l’autre, ce sera « vers l’infini et l’au-delà ! »
Crédit visuel Une : ESA wikipédia.