2021 M09 17
L’engrenage est connu : l’excès de CO2 émis provoque un réchauffement climatique qui entraîne lui-même des sécheresses locales. Dès lors, le risque d’incendie s’accroît et les terres arables deviennent stériles, à moins de mettre en place des irrigations. Bref, rien de très positif. Pourtant, ce constat d’assèchement a de quoi surprendre face aux phénomènes météorologiques enregistrés cet été.
[À LA UNE À 8H] Des pluies torrentielles dans le centre de la Chine ont fait au moins 21 morts, a annoncé la télévision publique, après des inondations dévastatrices en juillet qui avaient déjà tué plus de 300 personnes #AFP 1/5 pic.twitter.com/6D7JMeCULX
— Agence France-Presse (@afpfr) August 13, 2021
Pendant que la France vivait un été « pourri » et que des pluies torrentielles engloutissaient routes et métros en Chine, les États-Unis étouffaient sous des températures records dépassant 42° et les incendies dévoraient les forêts du sud de l’Europe. Comment ces deux états sont ils possibles en même temps ? Parce qu’en plus du climat, nous avons déréglé le cycle de l’eau.
C’est pas so(u)rcier
Sur notre planète, l’eau s’évapore des rivières, lacs et océans sous l’effet du soleil. Ses gouttelettes se rassemblent pour former des nuages que les vents poussent vers l’intérieur des terres. Quand les nuages sont saturés en vapeur d’eau, les précipitations se déclenchent : il pleut. Ça c’est la situation normale, mais l’homme a modifié les règles.
Par déforestation et bétonisation des sols, on accentue le ruissellement des eaux, empêchant la phase d’évaporation d’avoir lieu globalement. D’autre part le réchauffement général rend l’air rend capable de contenir plus de vapeur d’eau. Résultat, au cours du XXe siècle le niveau des précipitations quotidiennes a augmenté de 6 à 8 %. En conclusion, l’eau sur Terre est ultra-concentrée sur quelques zones qui la reçoivent en abondance au gré des vents et tempêtes ; les autres régions subissant l’assèchement.
A la lumière de ces explications, on comprend qu’il suffirait de « redistribuer les précipitations sur la planète pour limiter les pluies torrentielles et endiguer la sécheresse. C’est ce que propose un chercheur allemand dont la spécialité n’est pas le climat mais… l’éolien.
Irriguer l’atmosphère
A Flensburg, à la frontière de l’Allemagne et du Danemark se tient le WETI, un IUT dédié à l’énergie éolienne. Le professeur Clemens Jauch y conduit des recherches concernant « l’irrigation atmosphérique », un procédé expérimental visant à réintroduire de l‘eau en suspension dans l’air par le biais d’éoliennes et laisser le vent le porter.
Sehr aktuell vor dem Hintergrund der #Waldbraende: Der natürliche Wasserkreislauf funktioniert an vielen Stellen nicht mehr: Prof. Dr. Clemens Jauch will ihn wieder in Schwung bringen – mit wasserspeienden Rotorblättern und ganz viel Wind: https://t.co/XSscLi2yMe pic.twitter.com/MrdNZFjhll
— Hochschule Flensburg (@HochschuleFL) August 11, 2021
Du point de vue technique, il faudrait ajouter un système de pompage dans le mât et adapter les pales pour qu’elles puissent diffuser de l’eau sous forme de micro-gouttelettes dans l’atmosphère. L’éolienne n’agirait pas seulement comme un simple brumisateur, mais en ajoutant de l’eau elle accentuerait la saturation qui pourrait à son tour déclencher des pluies plus loin.
Éteindre les feux, nourrir les champs
Une solution pas si farfelue puisque la startup française Eole Water l'avait déjà envisagé en 2012. Les avantages d’exploiter les parcs éoliens sont nombreux. D’abord, l’infrastructure existe déjà et contribue à réduire le recours aux énergies fossiles. Dresser plus d’éoliennes servira la même cause. Ensuite, ce système est plus naturel que l’ensemencement des nuages. Enfin, le vent est un conducteur peu énergivore et puissant ; considérant la taille des éoliennes modernes, Clemens Jauch estime que « chaque turbine représente une surface d’émission d’eau égale à un terrain de football et demi ».
Eole Water pionnière de la production d'eau par condensation, présente sa Micr'o #energiesolaire #Eden #Eurosatory pic.twitter.com/9bX0326yiT
— EDEN Cluster (@EDENcluster) June 14, 2016
À écouter le professeur Clemens, les applications sont nombreuses. À courte portée, l’irrigation atmosphérique servira l’agriculture en hydratant les champs ; à plus longue distance, le déclenchement d’averses pourrait combattre les incendies. Quant on sait que chaque année, 34 km² de forêt brûlent en Corse, c’est tentant. « On peut également l’utiliser pour reconstruire les glaciers qui fondent en Norvège, au Groenland ou dans les Alpes » ajoute le scientifique.
Les chercheurs du WETI vont donc commencer à designer les pales adaptées et technologie de pompage en prenant soin à ce que ces ajouts ne réduisent pas les performances énergétiques des éoliennes. Reste un soucis à cette technique : trouver de l’eau douce à porter aux éoliennes. Car les nappes phréatiques sont déjà épuisées de par le monde. Clemens Jauch suggère d’utiliser l’eau des estuaires, ces sites où l’eau encore douce des rivières se jette dans les mers.