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Violences conjugales : on peut désormais porter plainte directement aux urgences

Tout ce qui peut aider à enrayer cette spirale de violences fatales est bon à prendre. C’est pourquoi les autorités judiciaires et médicales d’Île-de-France ont uni leurs forces.
  • Le 4 octobre dernier, le préfet de police de Paris, Laurent Nuñez rencontrait 4 procureurs de la région Île-de-France ainsi que le directeur général de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris pour signer une convention innovante : quand une femme est prise en charge pour des faits de violence conjugale aux urgences de 4 départements de la région, elle pourra directement déposer plainte sans avoir à se rendre à un hôtel de police.

    Suite à cette convention, le médecin urgentiste constatant les faits de violences doit systématiquement demander à la victime si elle souhaite porter plainte. Si c’est le cas, le soignant contactera la police par une ligne spéciale, accélérant le dépôt de plainte. L’audition se fera à l’hôpital en respectant la confidentialité. De son côté l’urgentiste peut également procéder au signalement des violences constatées, en écrivant auprès du procureur de la République.

    Un lieu unique (pour un drame trop répandu)

    Déposer plainte à l’hôpital est à la fois plus discret pour la victime, plus simple mais aussi plus efficace. En effet, en 2019 une étude nationale du ministère de l’Intérieur dénombrait 213 000 femmes victimes de faits de violences physiques et/ou sexuelles commises par leur conjoint or 70 % d’entre elles avaient subi des faits répétés. Mais seulement 18 % avaient effectivement déposé plainte en gendarmerie ou en commissariat de police, souvent par crainte de répercussion ou d’être culpabilisée.

    Cette innovation résulte du « Grenelle des violences conjugales » organisé par le gouvernement en 2019. Jusqu’ici trois établissements avaient expérimenté le dispositif : deux hôpitaux de Paris (Saint-Antoine et Tenon) et l’hôpital Henri-Mondor, à Créteil. Cette convention le généralise à tous les établissements de l’AP-HP des départements des Hauts-de-Seine, de Seine-Saint-Denis du Val-de-Marne et de Paris.

    Est-ce efficace ?

    Testé depuis 2020, ce système a déjà permis à 46 victimes de déposer plaintes aux urgences de l’AP-HP. Bien sûr ce dispositif de procédure simplifiée ne suffit pas en lui-même mais il permet de nombreuses autres actions pour stopper le coupables des violences comme pour protéger la victime.

    Comme le préfet de police l’a exprimé lors de la signature : faciliter le dépôt de plainte « ne se traduit pas par une baisse des faits, mais ce sont des plaintes qui n’auraient jamais été déposées » sans ce dispositif. De son côté, la procureure de Paris, Laure Beccuau, y voit un « nouveau pas en faveur de la révélation des faits ». Et c’est peu dire qu’on en a besoin…

    Le dernier rapport du ministère montre que l’Île-de-France est la région où les femmes subissent le plus de violences mortelles : on y recense 19 des 118 féminicides qui ont endeuillé la France en 2022, bien qu’à l’échelle des départements, les plus mortels restent le Nord, les Alpes-Maritimes et le Rhône. Faciliter le dépôt de plainte en réduisant démarches, lieux et temps est donc un véritable espoir.

    L’innovation de ce dispositif judiciaire a d’ailleurs été récompensée par le Conseil de l'Europe. L’institution européenne a remis à notre ministère le prix, une Balance de cristal, et appelé la France a généraliser la procédure dans l’ensemble des hôpitaux du pays.

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