À Nantes, des pépés et des mémés font la révolution par le tricot

Devant la gare de Nantes, tous les vendredis, des « pépés et mémés révoltés » tricotent « contre les violences policières ». L’initiative, lancée par Catherine Ruiz, 64 ans, pourrait fait sourire mais elle rappelle surtout qu’il n’y a pas d’âge pour résister.

Même si les cheveux blancs ne manquent pas dans les cortèges des manifestations (45 ans de moyenne d’âge chez les gilets jaunes selon une enquête du Monde), pour certains, ils n’ont rien à y faire. Pour preuve, la réaction d’Emmanuel Macron suite aux blessures de Geneviève Legay, 73 ans, après une charge policière à Nice en 2019 : « Quand on est fragile, qu’on peut se faire bousculer, on ne se rend pas dans des lieux qui sont définis comme interdits et on ne se met pas dans des situations comme celle-ci. »

Un rang après l’autre

Les vieux n’auraient rien à faire dans les cortèges ? Qu’à cela ne tienne, cela n’entravera pas leur engagement. Ni leur créativité. À Nantes, Catherine Ruiz, retraitée, regarde sur sa page Facebook les informations relatives aux accusations de violences policières. Elle qui n’était pas vraiment activiste, « un peu le ventre mou » selon ses mots, cherche comment mener une action pacifiste pour réveiller les consciences. « J’étais en train de tricoter. J’allais donc faire du tricot. Pourquoi la gare de Nantes ? Parce que c’est un lieu de passage. »

En plein hiver, fin janvier 2020, elle s’installe seule sur un banc avec son fil et ses aiguilles. Sur son panneau : « Mémé révoltée contre les violences policières. » Puis elle revient, chaque semaine, et ajoute des rangs à son combat. Ce sont maintenant une dizaine de pépés et de mémés révoltés qui se réunissent. « Les grands-parents doivent réagir pour préparer un monde agréable pour nos descendants, poursuit-elle. Ce qu’on tricote, ce n’est pas important. C’est le dialogue, le message. Bernadette, 75 ans, est révoltée tout le temps. Tous les vendredis, elle amène son tabouret et ça lui fait du bien, plutôt que de s’énerver toute seule. »

La vieillesse se rebelle

Le tricot n’est qu’un prétexte. Si Catherine avait été peintre, vous l’auriez vue avec son chevalet et ses pinceaux. Elle est loin d’être un cas isolé.

Le mouvement Extinction Rebellion, basé sur la désobéissance civile, a notamment son propre groupe nommé « Rebel Elders for Extinction Rebellion » (« Les vieux rebelles d’Extinction Rebellion »). Basés à Bristol, ces retraités sont passionnés par l’environnement et peuvent être identifiés par leur cape argentée qu’ils et elles arborent lors de leurs actions. Interrogée par le Guardian en octobre 2019, Sue Kilroe, à l’origine de la formation, expliquait que « travailler avec d’autres personnes âgées était un grand plaisir » et que « [sa] génération étant responsable, en partie, du réchauffement climatique, lutter pour le changement au sein d’Extinction Rebellion paraissait être quelque chose de juste ». 

Loin des unes des magazines, les personnes âgées (60 ans selon l’Organisation mondiale de la santé ou la carte senior SNCF) sont nombreuses à agir dans l’ombre mais encore aucune étude (à notre connaissance) n’a permis d’en dresser un portrait-robot. Contrairement aux stéréotypes les présentant comme réactionnaires voire passifs, apolitiques ou encore nostalgiques, beaucoup, comme Catherine ou Bernadette, n’ont pas dit leur dernier mot.

Crédits photo : Page Facebook Mémée révoltée.

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