2023 M09 25
D’un côté vous avez des stars du foot qui ne se déplacent qu’en jet privé et de l’autre des sportifs, de plus en plus nombreux, qui refusent de prendre l’avion pour limiter leur empreinte carbone. Avec en tête l’idée de préserver la planète et de poursuivre le mouvement du « flygskam », qui signifie littéralement « la honte de prendre l’avion » lancer en Suède à la fin des années 2010. Résultat : le trafic aérien a diminué de 5 % dans le pays alors que d'habitude il augmente de 3 % à 4 %.
Selon une étude publiée en 2020 dans la revue Atmospheric Environment, le trafic aérien représente 2,4 % des émissions mondiales de CO2. Un chiffre auquel il faut ajouter les rejets liés à la production et à la distribution du kérosène (20 % du total), pour atteindre 2,9 % des émissions globales de CO2. D'ailleurs d’après les prévisions des scientifiques, nous devrions atteindre les 16% d'ici 2050 si on ne change pas nos habitudes. C’est loin d’être négligeable et c’est la raison pour laquelle de nombreux sportifs de haut niveau n'hésitent pas à mettre un coup de frein à leur carrière.
C’est le cas de la jeune athlète anglaise Innes Fitzgerald qui a refusé d’être sélectionnée en février dernier pour les Championnats du monde de cross en Australie. En cause : le lourd bilan carbone du voyage. Pour les autres compétitions, la jeune prodige britannique du demi-fond ne prend plus que le train ou le bus comme elle l'a fait en décembre 2022 pour participer aux Championnats d’Europe de Turin en Italie. « J'avais 9 ans quand l'accord pour le climat de la COP21 de Paris a été signé. En huit ans, les émissions globales n'ont cessé d'augmenter, nous envoyant sur le chemin d'une catastrophe climatique » écrit-elle dans une lettre publiée par le magazine Athletics Weekly.
En France, Xavier Thévenard, la star de l'ultra-trail, détenteur du grand chelem du Mont-Blanc, le fameux UTMB, a également fait ce choix après la prise de conscience de la pandémie de coronavirus. « J’ai été éduqué dans la forêt et la montagne. Notre moyen de déplacement, c’était la course à pied, la marche. Cela m’a sensibilisé à la nature et sa fragilité. Ce qui me rend heureux, c’est le dépassement de soi et la contemplation de paysages magnifiques. Je me dis que dans mon activité, je n’ai pas le droit de détériorer un environnement qui me donne autant de bonheur. J’essaie de faire en sorte de diminuer mon impact au quotidien en m’associant avec des partenaires qui ont les mêmes convictions que moi », témoigne-t-il auprès du quotidien belge L’Écho.
Dans le même sport, le champion de trail Andy Simonds détaillait, en septembre 2022, pourquoi il a refusé de participer aux championnats organisés en Thaïlande. « Mon empreinte carbone pour 2022 sera d'environ 6,3 tonnes équivalent CO2, ce qui est déjà trop », écrit-t-il sur Instagram. En effet, pour respecter leurs programmes d’entrainement et de compétions certains sportifs émettent environ 25 tonnes de CO2 par an alors qu’il ne faudrait pas dépasser les 2 tonnes pour limiter le réchauffement climatique à 1,5 degré comme le préconisent les scientifiques du GIEC (le Groupe d’Experts Intergouvernemental sur l’Évolutions du Climat).
Pour tous ces sportifs engagés, il faudrait limiter les compétitions et les stages internationaux et les remplacer par des événements plus locaux. C'est aussi l'avis du navigateur Stan Thuret, qui a annoncé, au micro de France Inter, mettre un terme à sa carrière professionnelle de skipper, un métier devenu selon lui incompatibles avec l’urgence climatique. « Ce métier de skipper, il n’est plus soutenable, il ne fait pas du bien à la planète. Ce métier, s'il ne prend pas un virage, il va être pointé du doigt dans quelques années, comme on pointe déjà du doigt un footballeur comme Karim Benzema qui passe ses vacances à Miami, fait du jet ski et se déplace en avion à gogo. La voile a cette image verte, il faut qu'elle la garde mais il faut qu'elle fasse une transition. »
Une prise de conscience qui reste une exception même si par exemple le comité d’organisation de la Coupe du monde de rugby en France a décidé d’éviter au maximum l’avion pour les matches qui vont avoir lieu pendant la compétition. L’idée serait d'atteindre 80% des déplacements des équipes réalisés en train, 88% pour les supporteurs. Pour y arriver, les organisateurs ont imposé la règle suivante : tout voyage pouvant être réalisé en moins de 5h30, porte-à-porte, est obligatoirement réalisé en train et en bus. Le comité d’organisation espère ainsi mener un événement à un « impact positif » sur l’environnement.