

Ils ont crée des "Amazon régionaux" pour lutter contre l'impérialisme américain
On savait déjà que "nos régions ont du talent". Mais maintenant elles ont aussi des plateformes de vente en ligne bien référencées. De quoi sauver le commerce local et éviter les faillites ? Enquête.
2021 M03 1
Qu’ont en commun l’épicerie "Le Goût'Thé" dans la Loire, la Ferme des Aubracs près de Moulin, les bottes camarguaises Elygance dans la Haute Garonne, et "Le bien-être à cœur", guérisseuse-médium, dans la Drôme ? Ces commerçants vendent tous leurs service en ligne mais, contrairement à 11 000 PME françaises, ils n’ont pas choisi Amazon. Non, pour commercialiser leur services ils ont recours à une plateforme montée par leur région.
Quand votre boutique préférée est fermée, vous repassez le lendemain. Mais quand elle est fermée pour trois mois, on fait quoi ? A en croire les chiffres de 2020, vous commandez en ligne... Le commerce en ligne a explosé avec le confinement : +8,5 % en un an et 112 milliards d’euros de chiffre d’affaires. Une montée en puissance qui ne fait pas que des heureux car ce succès profite d’abord aux grandes surfaces spécialisées ou non (Darty, Fnac, Zalando…) et, bien évidemment, Amazon. Comme un phare dans la nuit, le web est apparu comme LA solution pour éviter la banqueroute.
Ce matin, Fnac Darty prend +7,26% à 37,54 euros,
— Jean-Louis SAPALY (@JeanLouisSAPALY) September 15, 2020
la plus forte hausse de l'indice SBF 120, après les déclarations de son directeur général, Enrique Martinez, qui a dit espérer un chiffre d'affaires 2020 proche de celui de l'an dernier. 👍👍
Ma petite e-entreprise, connaît pas la crise
Parce qu’à regarder si haut on en oublie les plus petits commerçants, les TPE, nos voisins du bout de la rue. Frappés de la mention « non essentiels », nombre d’entre eux ont frôlé la mort. En septembre, on dénombrait quelques 18 214 redressements et liquidations judiciaires… Pour limiter la casse, ils ont profité de l’élan d’e-commerce et se sont essayés au click & collect, des commandes prises par téléphones ou e-mail remises à la porte de leur magasin. Le gouvernement décréta des aides pour se former ou développer un site : 500 € de la part de Bercy, 1500 € de la région Île de France… C’est bien gentil, sauf qu’en réalité, il est bien difficile d’investir quand on ne sait pas si l'on va survivre.
« Seulement 1 commerçant sur 3 possède un site de vente en ligne. »
Dans la réalité, 1 commerçant sur 3 seulement possède un site boutique selon l’IFOP. D’autant plus qu’un site boutique coûte au minimum 2000 €, soit quatre fois plus cher que l’aide du ministère. Pour leurs commandes click & collect, ils se sont en réalité tournés vers leur page Facebook. Pourquoi ? Par manque de connaissance et de compétence non pas pour faire un site (le net regorge d’outils gratuits) mais pour le faire vivre et exister sur la toile : 70 % des TPE ne savent pas ce qu'est le référencement. C’est là que nos régions ont un rôle à jouer.

« Je lance un message solennel aux habitants d’Auvergne-Rhône-Alpes : n’achetez pas sur Amazon ! » ainsi s’ouvrait la conférence de Laurent Wauquiez en novembre dernier. Le président de la région précitée annonçait le développement d’une plateforme qui permettrait aux boutiques de vendre leurs produits. Il n’a pas fallu plus d’un mois pour lancer Jachetedansmaregion.fr, une « market place » pour les commerçants de ses 12 départements. Le système s’inspire donc d’Amazon : le catalogue est celui de la place de marché, mais c’est bien chez le commerçant que se fait la vente.
Il s’agit majoritairement de produits locaux, du terroirs ou artisanaux, mais pas seulement. La bataille se joue ailleurs : la plateforme est décrite comme « une sorte de porte-avions qu’on offre à tous les commerçants et sur lequel ils peuvent tous venir se référencer. »
Laurent #Wauquiez lance https://t.co/knBfchw17n le site qui veut concurrencer #Amazon en @auvergnerhalpes https://t.co/mxQdS1YVUS pic.twitter.com/dasHRKpEka
— Laurent Bernard (@Lechotier) December 3, 2020
Même son de cloche plus au sud : la région Occitanie a devancé l’expérience un mois plus tôt, avec son propre portail nommé "DansMaZone" pour la rime avec le GAFA. Ici aussi, on retrouve des offres de commerces non-alimentaires : vêtements, high-tech, jouets, créations… Évidemment la géolocalisation permet de piocher d’abord chez les producteurs les plus proches, avec des filtres malins : fabriqué en Occitanie, fait à la main, éco-conçu… tout pour défendre le Made in France, le bio et l’éco-responsabilité.
Une campagne d’affichage accompagnait le lancement et 4500 professionnels ont rejoint l’initiative gratuite. En d’Auvergne-Rhône-Alpes, ils étaient 9000 au lancement sur les 200 000 commerçants de la région montagneuse. Mais les deux annuaires ont continué leurs inscriptions depuis et c’est là que tout se joue.
Nos régions peuvent elles gagner la lutte ?
Selon l'Observatoire Société et Consommation, ces plateformes peuvent réussir là où d’autres portails plus anciens (comme Enbasdemarue en Isère par exemple ou AchetezA) n’avaient pas percé. Pourquoi ? Grâce au référencement justement. Chaque commerce renvoie ses clients sur la plateforme qui se nourrit de tous ces liens pour grossir son influence sur les moteurs de recherche, ce qui en retour, donne du poids au référencement du site / page Faceboook etc de chaque vendeur. Bien joué.
2021 s'approche du printemps et certain fruits peuvent être récoltés : 17% des consommateurs d'Amazon ont réduit cette année leurs achats sur la plateforme. Au profit d'autres ? Peut être bien. Ayant compris que tout se jouait là, Amazon lance un site pour former les commerçants à vendre en ligne... Rappelons en conclusion que, côté alimentation, il existe des sites de vente directe pour les agriculteurs, et pour les bibliophiles, des librairies alternatives à Amazon dont Livro. Pourquoi se retenir d’acheter en ligne, puisque cela peut désormais soutenir votre boutique préférée ?
Source Une : Couverture Le Parisien magazine, octobre 2012.