Au fait, la crème solaire est-elle vraiment écologique ?

L’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) a récemment alerté le gouvernement sur la dangerosité pour l’environnement et la santé, d’une molécule présente dans les crèmes solaires, l’octocrylène. Selon la Fondation pour la nature et l’homme, environ 25 000 tonnes de crème solaire sont déversées chaque année dans les océans. Alors, on s'enduit ou pas ?
  • La crème solaire, c’est un marché qui pèse plus de 300 millions d’euros de chiffre d’affaires par an. Mais c’est surtout un produit cosmétique — et non médical, même si selon Santé Publique France, environ 80 000 cancers de la peau sont diagnostiqués chaque année en France — pour se protéger des méfaits des rayonnements ultraviolets du soleil (UVA et UVB). En résumé, il est difficile, voire totalement impossible, de s’en passer dès que les beaux jours arrivent. Le problème ? La crème solaire est nocive pour l’environnement, et notamment les milieux aquatiques (océans, mers, rivières, etc.). 

    Quand on se tartine de crème solaire, notamment à la plage, il arrive qu’on aille aussi se baigner. Plutôt logique. Mais les « scientifiques estiment que 25% de la quantité de crème étalée sur le corps se dilue dans la mer au bout de 20 minutes de baignade », écrit France Info. Et c’est là que ça se gâte pour l’environnement : certains filtres chimiques présents dans la crème solaire sont toxiques pour les coraux. Récemment, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) a alerté le Ministère de la transition écologique sur une molécule en particulier, l’octocrylène.

    « Les recommandations de l’Anses concernent, à ce stade, uniquement les risques que présente l’octocrylène pour l’environnement, et en particulier pour les milieux aquatiques. Sa toxicité sur le zooplancton, les microalgues ou encore les coraux a fait l’objet de nombreux travaux. Du fait de son caractère bioaccumulable, l’octocrylène se retrouve aussi dans la chaîne alimentaire (coquillages, poissons, etc.) », peut-on lire dans le journal Le Monde.

    Effet boule de neige

    Pour les coraux par exemple, qui abritent 30% de biodiversité marine et qui constituent des zones de reproduction essentielles, la molécule entraîne leur décoloration mais impacte aussi leur croissance. À terme, les conséquences sont graves pour toutes les espèces qui dépendent des coraux pour leur survie. Pour le plancton, les microplastiques présents dans les crèmes s’apparentent à de la nourriture et s’intègrent donc dans leur organisme. Et comme les petits poissons se nourrissent de planctons, eux-mêmes se retrouvent avec des microplastiques au sein de leur organisme. Des poissons avalés par d'autres espèces, et que l’on consomme.

    Face à ce problème, certaines îles comme Palau, les îles Vierges ou encore Hawaï ont déjà interdit, pour protéger les coraux, les crèmes qui contiennent ces molécules comme l'octocrylène, l’oxybenzone ou encore l’octinoxate. En France, comme le rapporte Le Monde, le Ministère de l’écologie affirme avoir pris connaissance du problème, et qu’un dossier était en cours chez l’Agence européenne des produits chimiques. Sauf que la procédure n’aboutira pas avant 2025, au plus tôt.

    Pourtant, selon Philippe Lebaron, chercheur au Laboratoire de biodiversité et de biotechnologies microbiennes (Sorbonne Université, CNRS), il serait possible de faire interdire les molécules toxiques dès maintenant. Car l’octocrylène se dégrade, avec le temps, en benzophénone, un perturbateur endocrinien cancérigène.

    « Il y a suffisamment d’informations sur la cancérogénicité et les propriétés de perturbateur endocrinien de la benzophénone pour que son utilisation soit interdite en cosmétique. Selon toute logique, il n’y a donc pas besoin de plus de données pour interdire l’octocrylène ! », estime le chercheur.

    Une étude relayée par Les Échos, menée en 2021 par la Société américaine de chimie, la Chemical Research in Toxicology, arrivait déjà aux mêmes conclusions. En connaissance de cause, le gouvernement pourrait déjà interdire l’octocrylène pour «  protéger la santé humaine ou l’environnement », comme le prévoit la réglementation REACH

    Des conseils ?

    Pour se protéger et protéger les milieux aquatiques, il est donc conseillé de bien choisir sa crème solaire — et d’attendre environ 30 minutes après l'avoir appliquée avant d’aller dans l’eau. Ensuite, fuyez toutes les crèmes qui possèdent de l’octocrylène, de l’oxybenzone et de l’octinoxate. Enfin, faites attention à bien lire les ingrédients, même les crèmes certifiées par le label « océan friendly ». L’écolabel Nordic Swan, par exemple, est plus fiable et réellement attribué à des marques qui respectent l’environnement. Et si vous galérez à vous y retrouver, voici une sélection de crèmes écologiques ici

    A lire aussi