2022 M10 24
Il a la couleur noire du bitume, il ressemble fortement à du bitume et pourtant il n’a rien à voir avec le goudron issu de l’industrie pétrolière qui recouvre 99% de nos routes. À la fin de l’été, la société Eiffage Route et le département de la Haute-Garonne ont profité de la rénovation de l’une des chaussées du territoire pour tester, sur 1,7 kilomètre de la RD 17, un nouveau revêtement écologique au bilan carbone neutre : le Biophalt®.
Ce revêtement combine trois innovations majeures : « 1 - L’utilisation d’un liant bio sourcé, issu de la sylviculture et de produits de l’industrie papetière, qui se substitue en totalité au bitume traditionnel. 2 - Le recyclage de plus de 40 % d’agrégats d’enrobés issus de la chaussée en place (55% à Merville), qui permet une préservation de la ressource naturelle en matériaux neufs de carrières. 3 - L’abaissement de la température de fabrication, qui limite la consommation d’énergie et réduit les rejets de CO2 », souligne l’industriel à l’origine de cette invention.
Ce nouveau produit, que l’on appelle communément de la « poix », est issu de forêts de pin des Landes. Elle présente des performances environnementales élevées. « Mise en émulsion puis mélangée à température ambiante, la poix est vingt fois moins consommatrice d’énergie que le bitume traditionnel et est même négative en émission de CO2 », selon Eiffage. A Merville, la collectivité et le constructeur estiment ainsi avoir économisé 47 tonnes de CO2 par rapport à du bitume. Inconvénient : le Biophalt est 5 à 10 % plus cher que le bitume traditionnel. Il coûterait 16 euros le m2 contre 14 euros pour un enrobé classique au pétrole. Mais Eiffage espère que ce genre d’expérimentation lui permettra de démocratiser le produit pour faire baisser les coûts de production.
Des expérimentations ailleurs en France
Avant Merville, d’autres endroits ont testé ce revêtement « vert ». Il a été mis en œuvre pour la première fois en septembre 2020 sur la voie d’accès au tunnel du Mont-Blanc. Mais aussi pour la réfection de 2,1 kilomètres de chaussée de l’autoroute A40 à proximité de Vonnas (Ain) et sur la RN 205 au niveau du tunnel des Chavants (Haute-Savoie). Mais c’est le Gers qui a été le pionnier de cette expérimentation en rénovant une portion de chaussée de la RD 654, reliant L’Isle-Jourdain à Condom.
Maintenant, il faut tester la résistance du Biophalt sur la durée et évaluer s’il est aussi performant qu’un bitume classique. D’ailleurs c’est une première : à Merville l’industriel est autorisé à laisser le tronçon bitumé en couche de roulement direct (sans le recouvrir). Et ce pour pouvoir surveiller l’évolution du produit, sa résistance aux variations météorologiques et son comportement lié au trafic des poids-lourds notamment. Si l’expérimentation est concluante cela pourrait initier une nouvelle filière dans les années à venir.