On respire : la France a enfin réussi à réduire ses émissions de CO2 !

Un rapport présente une baisse de 2,7% des émissions françaises par rapport à 2021. Une bonne nouvelle certes, mais tous les secteurs ne sont pas égaux dans leurs efforts et les disparités cachent des lacunes…
  • Année après année, les scientifiques du GIEC rappellent que les politiques de réduction des émissions de gaz à effet de serre ne vont pas assez vite pour ralentir le réchauffement climatique. Mais ils ont dû être contents quand notre Première ministre a annoncé, lundi 22 mai, qu’en la matière “nous sommes en avance sur nos objectifs 2019-2023 et nous avons pratiquement rattrapé le retard accumulé lors de la période précédente". La France aurait donc fait mieux que ses engagements ? Oui, dit Élisabeth Borne qui s’appuyait alors sur le rapport de France Stratégie concernant le financement de la transition écologique. Et c’est plutôt vrai.


    Le Citepa (centre d'études de la pollution atmosphérique) faisait état d’un premier bilan en avril, de 408 millions de tonnes équivalent CO2 émises par les Français, alors que l’Etat s’était engagé à ne pas dépasser les 422 millions de tonnes entre 2019 et 2023. Ce qui représente “une réduction de 2,5% par rapport à 2021 (-6,2% comparé à 2019)" comme le décrivait le Citepa.

    Qui a vraiment fait des efforts ?

    Si baisse générale il y a, on la doit à certains secteurs économiques. La médaille dans ce domaine revient au bâtiment (-14,7%) qui a largement profité de l’hiver doux et des incitations à baisser le chauffage pour réduire la consommation d’énergies fossiles carbonées. Même son de cloche dans l’industrie (-6,4%) où la transformation des biens s’est faite avec une consommation de gaz bien moindre cette année.

    Pas de chance par contre, cet hiver 2022-2023 a aussi brillé par l’absence de ses centrales nucléaires, entraînant ainsi un report de la production d’énergie vers le gaz et le charbon, ce qui a augmenté les gaz à effet de serre du secteur (+4,9%). Pire : le transport, point noir majeur du CO2 français, poursuit sa montée, gagnant +2,3 % en un an.


    Mais quand même : les émissions ont baissé. Les procès pour inaction climatique auraient-ils tout faux ? Pas dit car, tandis que la Première ministre félicite l’action du gouvernement, rien ne prouve que ces réductions découlent de ses politiques.

    Fumeux ?

    En 2020, les émissions avaient déjà fortement baissé (-9,6%) suite à la pandémie de Covid-19 (confinements à répétition, complications des transports et échanges internationaux). Une forte reprise de l’activité a engendré un pic de carbone en 2021. Alors la chute de 2022 ne pourrait-elle pas provenir de la crise énergétique découlant de l’Ukraine et de l’inflation généralisée ? C’est le doute émis par le Conseil d’Etat à l'annonce de ce bilan. D’autant que, pour constater une tendance, il serait plus réaliste de comparer l'empreinte carbone par habitant et non par pays…

    Autre raison de faire la grimace, le chiffre tient compte des émissions réalisées « en France » et non « par les Français ». Ce qui nie toutes nos importations alors même que smartphones, consoles et voitures électriques viennent de Chine (championne du charbon) et nos vêtements du Bangladesh… Une estimation de 2017 montrait une différence de presque 200 millions de tonnes de CO2 en incluant ces pollutions délocalisées.

    L’effort à fournir est donc encore gigantesque. Il va pourtant bien falloir s’activer. Pour rappel la France s’est engagée à réduire de 33 % ses émissions en 8 ans pour n’émettre "que" 270 millions de tonnes de CO2 en 2030… alors qu’elle dépasse les 408 millions de tonnes aujourd’hui.

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