La FemTech : quand la technologie s’intéresse enfin aux besoins des femmes

Longtemps considérées comme les grandes oubliées des révolutions technologiques, les femmes trouvent enfin leur place dans cet écosystème. Mais si l’essor d’une « FemTech » est une bonne nouvelle, encore faut-il que les intentions ne soient pas uniquement mercantiles.
  • Diminutif de « female technology », le terme « FemTech » aurait été forgé en 2016 par l’entrepreneuse Ida Tin, créatrice de l’application de suivi des règles Clue. Il englobe l’ensemble des services et des solutions technologiques au service des femmes : implant mammaire en impression 3D avec biomatériau entièrement résorbable, vêtements spécial ménopause, diagnostic de l’endométriose, culottes menstruelles, app de suivi menstruel, etc.


    La startup alsacienne Fizimed a, par exemple, élaboré une sonde de rééducation du périnée connectée à une application mobile et déjà remboursée sur ordonance en Allemagne. Basée à Lille, la startup Lattice Medical procède actuellement à des essais cliniques sur une prothèse en biopolymère qui permet une régénération du tissu adipeux et ainsi en finir avec les implants en silicone. La plateforme Gapianne s'est spécialisée dans les produits (crèmes, accessoirs, etc.) pour le bien-être sexuel des femmes.

    Briser les tabous, améliorer le quotidien, remettre la femme au cœur des enjeux de santé… Selon Marine Wetzel, startup program manager à Station F et cheffe du pôle FemTech de Sista, cette filière est animée par des sentiments féministes :

    « La FemTech accompagne ce mouvement sociétal de libération de la parole des femmes, qui reprennent le contrôle de leur corps. »

    Qualifiée il y a peu « marché de niche », la FemTech affiche désormais de gros potentiels économiques : le secteur atteindra la rondelette somme de 1,15 milliard de dollars d’ici 2025, selon une étude. En France, le collectif d’entrepreneurs.euses #FranceFemTech, comptait en 2021 plus de 70 jeunes pousses françaises sur ce segment.

    Patriarcat, quand tu nous tiens

    Mais malgré ces promesses de retour sur investissement, les startuppeuses se heurtent toujours au « vieux monde », comme l’explique Shiraz Mahfoudhi, coordinatrice du programme Inclusion & Diversité chez Sista :

    « La FemTech se confronte à deux principaux obstacles : le premier concerne l’accès au financement. Les sujets traités par les entreprises sur ce marché sont souvent tabous en société. En plus, les investisseurs étant principalement des hommes, ils ont du mal à comprendre le besoin adressé et l’opportunité commerciale qui se cache derrière. »

    Aussi, les levées de fonds semblent refléter les biais sexistes sur le corps des femmes : seulement 21 millions et 40 millions de dollars ont été levés pour les domaines de la "Menstrutech" et du bien-être sexuel, tandis que 228 millions et 423 millions de dollars ont été sortis du portefeuille des investisseurs pour les secteurs de la maternité et de la fertilité.

    Pire, certains fonds d’investissement refusent de financer tout ce qui a trait à la santé sexuelle, car ils assimilent cela… à de la pornographie ! Vertige.

    Libéralisme pavé de bonnes intentions

    La FemTech s’attire toutefois les mêmes reproches que ceux faits à la Silver economy, destinée aux seniors : un certain opportunisme cynique et des logiques marchandes décomplexées. Par exemple, la plupart des applications de suivi menstruel et de grossesse ne sont pas au clair quant aux données personnelles de santé. Lors d’une récente étude de la fondation Mozilla, 8 de ces applications sur 10 se sont vu accolées du pictogramme infamant « Confidentialité non incluse ». Seules Euki et Natural Cycles Birth Control passent le test. Pire encore : l’app de Ida Tin, celle qui a inventé le mot « FemTech », échoue !

    Autre problème, la recherche scientifique reste encore à la traîne quant aux maladies qui touchent particulièrement les femmes, comme le rappelle Diane Roujou de Boubée, directrice d’investissement chez Citizen Capital :

    « Les femmes ne représentent que 4% de l’ensemble du financement global de la recherche en santé. En comparaison, 2% de cet argent est destiné spécifiquement au cancer de la prostate. »

    Heureusement, les lignes sont en train de bouger. Avant, on ne parlait que du cancer de la prostate. Aujourd'hui, l'endométriose, cette maladie chronique invalidante qui touche entre 150 et 180 millions de femmes en âge de procréer dans le monde, n'est plus méconnue du grand public. D'où l'importance de faire connaitres les maladies et les maux qui touchent les femmes pour mieux les combattre.

    Crédit Une : Flickr WOCinTech Chat.

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