2022 M01 24
Les stations d’épuration, ça n’a jamais vraiment intéressé grand monde. Il faut dire que le sujet est peu ragoûtant : ces infrastructures situées généralement en périphérie des villes sont bien cachées du grand public et leur rôle consiste essentiellement à récupérer nos eaux sales et polluées pour les filtrer, les assainir, et renvoyer tout ça dans la nature par la suite.
Mais à la faveur de la transition écologique, voilà que leur rôle pourrait prendre une autre dimension et devenir beaucoup plus intéressant. Car nos eaux usées sont en vérité pleines de vertus et de trésors que nous commençons tout juste à exploiter.
Elles pourraient être une arme à employer pour lutter contre la sécheresse, mais aussi pour créer du gaz vert afin de chauffer des bâtiments. On y retrouve également des métaux rares utiles pour la fabrication, par exemple, des smartphones et autres équipements électroniques. Bref, alors qu’elles étaient ignorées jusqu’ici, les stations d’épuration attirent désormais tous les regards.
Une arme pour lutter contre la sécheresse
70% de l’eau potable disponible à travers le monde est utilisée par l’agriculture pour irriguer les champs. C’est à la fois énorme et insuffisant car, au fur et à mesure que les canicules et périodes de sécheresse s’intensifient, le monde manque d’eau pour produire son alimentation.
C’est là qu’interviennent les stations d’épuration. Initialement, elles sont conçues pour assainir nos eaux usées et les rejeter dans les rivières afin qu’elles poursuivent le cycle de l’eau naturellement. Mais si on les utilisait pour irriguer les champs, cela pourrait résoudre bien des problèmes. Correctement traitées, elles ne représentent aucun danger d’un point de vue sanitaire. Elles sont même chargées en minéraux qui pourraient permettre de réduire l’usage des engrais.
Des exemples existent déjà pour cela : Israël réutilise 80% de ses eaux usées traitées pour l’agriculture. C’est aussi le cas à Singapour ou en Espagne. En France, pour le moment, seuls quelques démonstrateurs existent sur ce sujet. Mais une nouvelle réglementation européenne pourrait bientôt changer la donne.
« Israël réutilise 80% de ses eaux usées pour l'irrigation, Singapour à 30% et l'Espagne à 14%. En France, nous sommes à 0,6% de ce potentiel. »
Des boues converties en gaz vert pour chauffer les bâtiments ?
Le processus d’épuration des eaux usées présente un autre avantage pour l’environnement : il produit des déchets sous forme de graisses et de boues. Pourquoi un déchet serait-il un avantage ? Parce que les scientifiques ont découvert qu’en récupérant ces boues et en les faisant fermenter, elles dégagent un gaz vert qu’on peut réutiliser pour des usages domestiques.
Ce gaz renouvelable peut ensuite servir à chauffer des maisons, mais aussi pour la cuisson et la production d’eau chaude. Il peut même servir de carburant pour certains véhicules. À Nantes, Perpignan, Grenoble ou Lyon, de premières expérimentations utilisent ce potentiel pour produire du biogaz.
En outre, à l’issue du processus de fermentation qui transforme les boues en biogaz, il apparaît un petit résidu qu’on appelle le digestat, et qui peut servir d’engrais pour les champs. Comme quoi, la richesse de nos égouts est infinie !
De l’or, du cuivre et du zinc dans les eaux usées
Mais ce potentiel ne s’arrête pas là. D’après une étude américaine publiée il y a quelques années, les boues d’épuration contiennent aussi un véritable minerai qui pourrait être exploité à l’avenir : une ville de 1 million d’habitants produirait ainsi l’équivalent de 11 millions d’euros de métaux divers : platine, cuivre, fer, zinc, argent et or.
Pour le moment, les méthodes d’extraction de ces métaux sont encore coûteuses et peu répandues. Mais à l’avenir, elles pourraient représenter un fabuleux potentiel pour certaines industries comme l’électronique. Alors, les stations d’épuration, c’est un peu plus cool que ce que vous pensiez, non ?