2022 M03 14
En France, 69% des morts sur la route et 80% des morts par overdose sont des hommes. Faut-il y voir un lien entre la masculinité et les conduites à risques ? Pour les chercheurs Sylvie Ayral et Yves Raibaud, co-auteurs de l’ouvrage La Fabrique des Garçons (2011), ce sont en effet des conséquences visibles d’une éducation masculine, encore trop centrée sur l’agressivité et la compétition ainsi que sur des modèles “d’hommes virils” qui, de John Wayne à Sylvester Stallone, en passant par Marlon Brando et Bruce Willis, n’affichent jamais leurs faiblesses et sont presque toujours immortels.
Afficher ses faiblesses, c’est un autre stéréotype de genre qu’on accorde plus volontiers aux femmes. Mais contrairement aux idées reçues, c’est justement ce qui les rend plus fortes et leur permet de mieux vivre leurs difficultés. Un constat que pointent aujourd’hui plusieurs études, que reprend notamment la philosophe Olivia Gazalé dans son ouvrage Le mythe de la virilité (2017), soulignant que “les hommes ne semblent pas réaliser que beaucoup de leurs problèmes viennent des archétypes de ce modèle unique du surhomme qui aboutit à une décompensation”. Et donc à des comportements risqués.
Une décompensation loin d’être anodine car, aujourd’hui en France, le taux de suicide masculin est 3 fois plus élevé que le taux de suicide des femmes. Un constat similaire en Grande-Bretagne où le suicide est également la première cause de mortalité masculine avant 34 ans. Des chiffres que l’on retrouve également en Australie et au Canada.
Les hommes sont 3 fois plus exposés que les femmes au risque de burn-out
Après deux ans de crise sanitaire, une récente étude réalisée par OpinionWay pour le cabinet Empreinte Humaine, a mis des chiffres concrets sur l’augmentation de la détresse psychologique au travail. Le burn-out toucherait aujourd’hui une part édifiante de la population française : 2,5 millions de personnes.
Et là aussi, ce sont bien les hommes qui sont majoritaires dans cette situation, comptant pour 53% du total. Un chiffre qui confirme donc que le burn-out touche davantage la population masculine… bien que de nombreux clichés jugent encore ce phénomène comme “plutôt féminin”.
La différence, c’est que, dans la majorité des cas, le burn-out masculin est un burn-out silencieux, car ils sont beaucoup moins enclins à l’avouer et le rendre public. “Quand les hommes rencontrent des difficultés, au travail ou ailleurs, ils ont moins tendance à en parler” explique ainsi l’enseignant américain John Malesic dans une tribune publiée par le New-York Times. Alors, faudrait-il voir davantage Bruce Willis chez le psy dans ces prochains films pour permettre aux garçons d’avouer leurs difficultés ?
Il semblerait que oui. En tout cas, une étude canadienne publiée récemment montrait par exemple que les hommes sont globalement deux fois plus nombreux que les femmes à n'avoir personne à qui se confier en cas de problème dans leur vie. Un vrai paradoxe quand on sait que le modèle masculin est souvent construit sur la base de l’homme fort qui est socialement très entouré.