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Panneaux solaires, toilettes sèches... voici le cinéma le plus écolo de France

Il ne suffit pas de faire des films qui parlent de nature pour rendre le cinéma écolo. En France, une salle a décidé de rendre chaque projection plus responsable et plus sobre.
  • Le plus sale au cinéma, vous trouvez que ce sont les pop-corns froids collés sous le fauteuil ? Tout faux : nos cinés sont salissants car leurs projections sont ultra-énergivores. C’est le CNC (Centre National du Cinéma et de l'image animée) qui l’affirme, après avoir mené un sérieux bilan carbone des salles de cinéma, l’an dernier. En particulier, 4 postes sont montrés du doigt : le chauffage, la ventilation, les projections et la climatisation pèsent à eux seuls 85 % des dépenses énergétiques des établissements. Des consommations mastodontes malgré de mauvais DPE (diagnostic énergétique) : 64 % de ces bâtiments souvent vétustes dépassent 300 kWep/m² par an.

    Sans compter que l’activité des cinémas a aussi un versant "déchets" à déplorer. Une majorité des salles étudiées par le CNC ne procède pas au tri des déchets, générant ainsi des centaines de tonnes d’équivalent carbone.

    Alors que faire ? Tirer le rideau du 7e art parce qu’il pollue trop ? Pas du tout. Une loi de 2018 prévoit déjà que les cinés de plus de 1000 m² (les plus de 300 fauteuils, qui représentent presque la moitié du parc français) devront réduire leur empreinte de 40 % d’ici 2030. Les plus petits sont, pour l’heure, oubliés mais heureusement, certains n’attendent pas pour se réinventer.

    L’Aube se lève sur le 7e art

    Anne Faucon est un nom connu des amateurs des salles obscures : sa maman, Anne-Marie Faucon, est la cofondatrice d’Utopia : un réseau de cinémas d’Art & d’Essai qui rayonne depuis 40 ans dans 6 villes de France, sans blockbuster mais avec des films du monde entier projetés en versions originales.

    Dans la digne ligne de sa mère, Anne Faucon veut désormais donner vie au cinéma de demain. Ce qui l’a amenée à faire construire un établissement d’un nouveau genre dans l’Aube.

    Situé à Pont-Sainte-Marie, non loin de Troyes, le bâtiment qu'elle a fait construire est 100 % éco-responsable : ossature bois, isolation à base de paille et des panneaux photovoltaïques sur le toit pour être autonome. Selon leurs simulations thermiques, ce bâtiment « n’est pas plus énergivore au m3 qu’une grande maison individuelle passive ». Pourtant l’échelle n’est pas celle d'une villa : le cinéma de presque 850 m² compte 4 salles combinant presque 300 places. Et Utopia ne s’arrête pas là.

    Lumière, pas moteur, mais action

    Le lieu est nettement orienté vers la sobriété. Pas de popcorn dans les salles (remplacées par des châtaignes à l'accueil) ni de bornes d’arcade dans le hall, mais on peut se détendre et parler films ou société devant une cheminée. Un système de récupération des eaux pluviales est en place ainsi qu'un poêle à granulés et... des toilettes sèches.

    Évidemment, un garage à vélo vous accueille à l’extérieur. Et pour les projections, Anne Faucon a misé sur des projecteurs moins énergivores que ceux au Xenon (gaz très polluant nécessitant une VMC puissante). Lieu comme exploitation, l’Utopia aubois coche toutes les cases des préconisations de sobriété du CNC. « Quant à son bilan carbone : 12 ans de fonctionnement équivaudront à un aller-retour en avion pour 5 personnes à Nouméa » se targue la patronne.

    Le cinéma vert tisse sa toile

    L’image est parfaitement claire, il ne reste qu’à l’imiter. A ceci près que le secteur va mal depuis le Covid (26% de la fréquentation reste portée disparue) et que nombre de cinés sont installés dans de vieux bâtiments trop chers à rénover. Anne Faucon a récolté 80 000 € par crowdfunding et déplore le manque de soutien pour de telles initiatives pourtant recommandées et indispensables pour l’avenir.

    Comme tout innovation sociale (le bio, la mobilité électrique…), on pourrait croire que ce ciné sera réservé à une clientèle qui a les moyens. Perdu, les tickets sont à 4,50 € pour les enfants et 7 € pour les adultes (ou 50 € les 10 billets).  Le ciné pratique même le ticket « suspendu », acheté à l’avance et offert à des inconnus. A l’ère du tout streaming, la magie du cinéma opère donc encore.

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