2021 M02 10
Droit de vétos
Alors que les mesures de restrictions frappent durement les SDF depuis un an, les gestes de solidarité se multiplient pour leur venir en aide. Mais peu s’intéressent à leurs compagnons à quatre pattes. Pourtant difficile de ne pas y penser tant c’est souvent ainsi qu’on les reconnaît, marchant en ville suivis par un ou deux chiens, assis avec un chat sur les genoux, un furet sur l’épaule etc. Et si vous l’oubliez c’est lui, le compagnon à fourrure qui viendra à vous, déclenchant la conversation plus facilement que n’importe quel autre être humain.
C’est pour ça, pour entretenir ce lien précieux et familier, et pour garder en forme ces bestioles profondément aimées par celles et ceux qui n’ont plus ni domicile ni famille, que certaines associations se bougent. S’il fallait n’en citer qu’une, ce serait Gamelles Pleines, dont les bénévoles font des rondes pour distribuer des croquettes aux chiens et chats.
Comme au premier confinement, Gamelles Pleines Toulouse est présente aux côtés des plus démunis pour les aider à traverser cette épreuve difficile.
— Association Gamelles Pleines France (@GamellesPleines) November 8, 2020
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Présents du Nord à Montpellier en passant par la Normandie, la Bretagne, la Gironde et paris, ses volontaires agissent de nuit au moment où la faim se fait sentir. Car leur constat est sans appel : tous préféreront se serrer la ceinture que de laisser leur animal affamé. Au point que nombreux ont déjà… de l’embonpoint. Plus qu’un cadeau sympa, ces croquettes gratuites sont l’assurance que l’animal mange sainement, évitant des complications futurs, et c'est aussi un coup de pouce au « pouvoir d’achat » de son maître, notamment pour se nourrir lui-même.
Inispensables dispensaires
Nourrir c’est essentiel, mais hélas ça ne suffit pas. La SPA possède une douzaine de dispensaires en France qui pratiquent des consultations à prix réduits sur présentation de documents attestant d’une situation précaire : avis de non-imposition, attestation de RMI… Le problème est qu’en vivant dans la rue, la plupart ont perdu ces documents si précieux aux yeux de l’administration, et que les plus exclus ne touchent aucune de ces aides. C’est là que d’autres ont choisi de ne pas attendre qu’on les visite pour aller de l’avant. Et ces bienfaiteurs ne sont pas de gentils amateurs mais de vrais professionnels comme à l’école de vétérinaire de Lyon.
Créée en 2008, le Dispensaire Vétérinaire Étudiant (ou DVE) rassemble profs et étudiants de 1ère et 2ème année qui s’organisent pour faire des maraudes et des consultations dans les centres d’hébergement de l’agglomération lyonnaise. La loi interdit en effet de soigner dans la rue, mais 5 structures les accueillent une fois par semaine. L’occasion de consultations pour ausculter les animaux, faire des rappels vaccinaux et des soins de base (plaies, infectons, mais aussi traitement parasitaires). Le tout gratuitement. Ce n’est pas rien car le montant des actes en cabinet de vétérinaire pèse lourd pour un sans-abri : « On me demandait presque 150 € juste pour une consultation, raconte l’une d’eux. Tout mon RSA passait dedans. »
En 2020, ils étaient 115 bénévoles à s’activer chaque semaine. « Notre objectif, résume leur coprésidente, Ana Alkan, est de faire un maximum de médecine préventive pour les propriétaires de ces animaux ». Et il y a à faire : surveiller leur dentition, peau et poils, oreilles, digestion… tout y passe. Mais le DVE s’applique aussi à élargir son action de sensibilisation et de formation. A terme, ces vétérinaires veulent « faire changer le point de vue sur l’animal dans la rue » et considérer que la prise en charge des travailleurs sociaux s’applique au duo homme/animal. Ce qui est loin d’être d’être gagné : l’un des freins les plus connus pour rejoindre un centre d’hébergement est que ceux-ci refusent catégoriquement les chiens…
Soigner, quoi qu'il en coûte
Lyon n’est pas seule dans ce combat : à Bordeaux, l’association Vétérinaire pour tous 33 traite les urgences gratuitement et assure les soins de base à ceux qui ne pourraient pas les régler. A Lille, on peut se tourner vers Happy Vet, un cabinet vétérinaire solidaire fondé en 2016. Après 17 ans dans un cabinet classique, Karine Massé a choisit de réduire ses prix pour ceux qui ne pourraient les payer. Son credo : « ce n’est pas parce que les soins sont moins chers qu’ils sont low cost ! La seule différence est que je n’ai pas de scanner, ni de radio. » Pas de matériel à rembourser, donc pas de course à la rentabilité. Evidemment, elle pratique, elle aussi, les maraudes. Parallèlement, elle collecte des dons auprès de sa clientèle habituelle que son Vet Dispensaire va distribuer dans les rues, sous forme de médicaments et petits traitement (comme les vermifuges).
Pour aller plus loin qu'une consultation
Enfin, si le besoin se fait sentir, que les soins de base ne suffisent plus, les plus démunis peuvent se tourner vers la fondation Assistance aux animaux : ses centres, situés dans les grandes métropoles, proposent des soins plus « lourds » tel que des opérations ou des radios mais aussi les tatouages réglementaires, à des tarifs solidaires (l’acte peut être jusqu’à 70 % moins cher). Pour rejoindre ces initiatives citoyennes, le gouvernement a lancé Vétérinaire pour Tous. Ce dispositif devrait aider les vétérinaires qui le souhaite à assurer cette mission de santé publique partout en France. Car quand on parle de désert médical, on oublie de dire qu’il n’y a que quatre écoles vétérinaires en France. Heureusement, certaines blouses blanches remontent les manches pour que chiens et chats continuent de faire ce qu’ils font le mieux : nous "redorer" le sourire.