Dans ces villes, ce sont les enfants qui font la loi à la mairie

Annecy, Quimper, Dijon… Bienvenue dans les "Villes Amies Des Enfants". Toutes ces municipalités ont désormais reçu cette certification de l'UNICEF qui salue les efforts pour construire une ville pensée POUR et AVEC les enfants.
  • Bien plus spectaculaire que le passage de ses rues à 30 km/h, Paris vient d'en piétonniser 185. On les appelle des « rues scolaires », un concept qui consiste à interdire (et bloquer) toute circulation sur les axes autour d’une école pour mettre les enfants en sécurité et offrir aux écoliers un espace où jouer et se rencontrer. Depuis sa création en 2012 en Belgique, Londres, Lyon et Lille s’y sont mises aussi. Paris a même annoncé vouloir à terme « apaiser les alentours des 1 200 écoles que compte la capitale, dont 300 qui seront totalement piétonnisées ».

    Des rues moins dédiées aux transports qu’aux enfants... Quelle mouche a pu piquer les municipalités ? La même qui estime que chaque aménagement urbain pèse sur le développement, l’avenir et donc la vie de nos bambins. Et qu’à ce titre, il convient de les inclure dès le processus de décision.

    Fais pas ci, Fais pas ça...

    Comme une preuve de cette nécessité, une étude menée auprès de 12 000 parents néerlandais a constaté que 15 % des enfants ne jouent jamais dehors. En cause, la peur des automobilistes, la complexité des signalétiques, la place des mobilier et infrastructures inadaptée… Des obstacles identifiés depuis 30 ans par le chercheur en sciences cognitives italien Francesco Tonucci, auteur de La Città dei bambini. Ce livre est un manifeste pour adapter nos villes à cette population ignorée.

    Ses préconisations ? Modifier nos priorités d’aménagement urbain, comme la largeur et hauteur des trottoirs, la place dédiée au stationnement, l’accès aux espaces verts, la taille des portes... Mais aussi offrir aux plus jeunes un (vrai) statut de citoyen. Ce qui signifie connaître leur opinion, leurs besoins et les informer, les éclairer sur les tenants et les aboutissants des choix, leurs droits et leurs devoirs…

    Francesco Tonucci s’appuyait sur des expériences menées en 1991 dans la ville de Fano, aujourd'hui imitées dans plus de 200 villes. Surtout, elles ont été reprises par l’UNICEF qui a créé le label “Ville Amie des Enfants”.

    Unsplash / Vita Marija Murenaite

    Concrètement que font les maires ?

    Les villes de ce réseau vont élaborer un plan d’action municipal courant jusqu’en 2026 en se basant sur les recommandations de l’UNICEF (voir ci-dessous), le présenter aux moins de 18 ans pour qu’ils expriment leur ressenti et fassent remonter leurs besoins. Puis, ceux-ci seront invités, selon leur compétence, à réaliser la tâche ou en constater l’évolution.

    C’est comme cela que des enfants de Bruxelles ont souhaité avoir des endroits pour se cacher dans les parcs de jeux plutôt qu’un terre-plein, pour avoir leur intimité et se dégager de la surveillance des adultes. Certaines villes comme Gand ont préférer concevoir des jeux urbains intégrés aux rues plutôt que des parcs fermés. Mais on a aussi installé une "boîte aux lettres pour enfants" en école primaire, pour libérer la parole sur les violences physiques, verbales ou sexuelles. A Limoges, on a mis en place un conseil municipal des enfants, constitué de 66 élèves de CM1 et CM2 des deux sexes élus pour deux ans.

     

    Et c'est valable à tout âge. A Quimper, on a consulté les collégiens pour renforcer l’égalité garçons et filles notamment dans leur accès aux loisirs, tandis qu'à Marcq-en-Barœul, les élèves ont rédigé une charte sur le respect intégré depuis au règlement intérieur de l'établissement.

    5 règles, un jeu d’enfant

    Alors c'est quoi ce label ? Depuis 2002, la certification "Ville Amie des Enfants" est délivrée en partenariat avec l’Association des Maires de France pour établir un standard de qualité en matière de cadre de vie. Sa ligne directrice : « Le bien-être des enfants est l'indicateur suprême d'un habitat sain, d'une société démocratique et d'une bonne gestion des affaires publiques ». Rien de moins.

    Pour l’atteindre, les collectivité (villes, agglos, départements) signataires s’engagent en faveur de cinq domaines en matière d'éducation, d’épanouissement, de lutte contre les discriminations et l’exclusion, la défense des droits des enfants et leur implication civile. Des recommandations un peu procédurières mais qui obligent les municipalités à s’engager sur des aspects plus vastes qu’une rue piétonne ou un parc en bois.

    À sa création, la charte « Ville amie des enfants » a été signée par 12 villes françaises, dont Bordeaux, Nantes, Toulouse et Paris. Elles sont déjà 32 en 2003. En 2018, le réseau comptait 245 villes et 16 intercommunalités. Et même si les mairies changent de mains, nul ne pense aujourd’hui à s’en écarter. Les enfants peuvent enfin donner de la voix.

    Crédit photo Une : Ville de Niort.

    ville amie des enfants UNICEF

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