2021 M02 23
Caves souterraines, garde-manger aérés sous une fenêtre, réfrigération passive par rayonnement… Cela fait des siècles que les peuples du monde entier tentent de conserver leur nourriture le plus longtemps possible en inventant d’ingénieuses façons de maintenir la chaîne du froid. Au Maroc, où l’électricité n’est pas arrivée dans 45% des zones rurales, une jeune ingénieure de 23 ans, Raowia Lamhar, a créé sa startup GoEnergyless Solutions, qui vient de mettre au point Fresh’it, un frigo low-tech qui fonctionne sans électricité.
S’inspirant d’un ancestral système de conservation, ce réfrigérateur, écologique et abordable, n’a pas besoin d’être branché pour fonctionner. Il est composé de deux pots en argile, imbriqués l’un dans l’autre et séparés par du sable. Il suffit d’humidifier régulièrement ce dernier et on peut faire descendre la température du frigo à 6 degrés pendant 10 jours. "Plus il fait chaud dehors, plus l’évaporation est forte et l’effet du réfrigérateur efficace", explique aux aventuriers d’Energy Observer Raowia Lamhar. "La seule contrainte : arroser le sable quotidiennement", ajoutent les membres de la mission.
C’est la rencontre avec un jeune diabétique qui a donné cette idée à l’ingénieure. Il enterrait en effet son insuline dans le sable en l’arrosant régulièrement, afin de la conserver au frais. Néanmoins, ce n’est pas le premier frigo fonctionnant en autonomie, mais c’est sans doute le plus abordable. En 2015, un designer néerlandais, Floris Schoonderbeek, avait par exemple créé Weltevree, une sorte de mini-cave en polyester à enterrer dans son jardin (de quoi stocker jusqu’à 500 kilos de denrées), mais son prix s’élevait à 7450 €. Le procédé même du réfrigérateur sans électricité, également nommé "frigo du désert", a été conçu par Mohammed Bah Abba, un enseignant nigérian, dès 1995 !
SerVies, des assiettes en particules fines récoltées dans Rotterdam
Avec SerVies, Iris de Kievith, architecte, et Annemarie Piscaer, designer, viennent d’inventer à Rotterdam (Pays-Bas) une ligne de vaisselle pas comme les autres. D’une part parce qu’elle sensibilise à la pollution invisible que l’on respire tous dans les rues de nos villes autour du monde, la rendant palpable et donc "réelle". Ensuite parce que cette idée de génie, intégrant des poussières urbaines à de la céramique, est fonctionnelle. On peut manger dans ces assiettes et boire dans ces verres. La question est de savoir si voir d’aussi si près les particules de pollution donne envie de se mettre à table.
En effet, les couleurs "naturelles" de cette ligne au design scandinave proviennent de la quantité de particules trouvées dans différents endroits de Rotterdam. À chaque niveau de sédimentation sa couleur, plus ou moins foncée selon le temps durant lequel la pollution s’était déposée. Energy Observer : "Pour faire évoluer les comportements, elles ont décidé de rendre tangible ce poison invisible qui pénètre au plus profond de notre arbre respiratoire. Pour qu’enfin, nous délaissions nos voitures lorsque d’autres mode de déplacement moins polluants sont disponibles."
La pollution récupérée "le long des tunnels, des artères embouteillées de Rotterdam", est évidemment désormais inoffensive, une fois intégrée et capturée par l’émail. Néanmoins, "le résultat est impressionnant, les céramiques forment un inquiétant nuancier allant du jaune clair au brun très foncé". À terme, les deux créatrices veulent que leur vaisselle "consciente" soit utilisée lors du dîner d’un sommet international. "Chaque grand dirigeant mangerait ainsi dans une assiette teintée par la pollution de sa capitale." Un symbole très fort.
Premier ambassadeur français des Objectifs de Développement Durable de l’ONU, la mission Energy Observer sensibilise aux solutions innovantes avec son bien-nommé projet "Solutions". Mais Energy Observer, c’est avant tout le nom du premier navire autonome en énergie, à la fois plaidoyer et laboratoire de la transition écologique. Toutes les informations sur le projet sont à découvrir ici.
Crédit photo Une : GO ENERGYLESS