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Dans le jargon, les artistes engagés dans le développement durable parlent d’upcycling. En utilisant le déchet comme de la matière brute, ces créateurs veulent détourner l’objet récupéré de sa fonction initiale pour faire émerger une œuvre originale. Le concept n’est pas nouveau. En 1908, Picasso avait déjà dessiné Le rêve, un tableau représentant des jeunes femmes nues endormies, sur un vieux support en carton. Aujourd’hui, les artistes qui confectionnent des œuvres à partir de déchets sont de plus en plus nombreux car c’est une démarche à la fois artistique et écoresponsable.
De vieux ordinateurs pour faire des tableaux et des sculptures aux couleurs vives
Dadave, un sculpteur plasticien francilien récupère les composants électroniques des ordinateurs promis à la casse. « L’ordinateur est hyper symptomatique de la manière dont on peut traiter l’écologie et dont on se moque de l’environnement. En trois ou quatre ans de vie seulement, il pollue énormément et il intoxique ceux qui extraient et recyclent les métaux rares qui servent à le fabriquer », dénonce l’artiste. Méthodiquement, Dadave démonte les vieux PC puis il classe, ordonne et trie les résistances, les condensateurs, les bobines et les circuits imprimés pour constituer ses œuvres. « Au départ, c’est un vrai travail d’accumulation, c’est ce qui me plaît. Il y a des milliers de pièces différentes et identiques. Ce qui m’amuse c’est qu’elles ont beaucoup de formes et de tailles différentes. » A l’arrivée, des séries très colorées de dix pièces numérotées maximum sortent de son atelier.
Des dessins 3D en plastique recyclé pour égayer son salon
Avec la même considération pour la planète, Octopode, né de l’association d’un dessinateur et d’un serial entrepreneur, produit des dessins en 3D faits à partir de plastique recyclé. « On ne voulait pas ajouter une matière supplémentaire polluante pour créer nos objets de décoration », explique Christophe Iriondo, le jeune patron. Banco : ils ont trouvé un filament 3D synthétique d’un millimètre d’épaisseur, fabriqué à partir des bouteilles plastiques bleutées qui sont nettoyées, broyées, puis refondues. Techniquement, le dessin est réalisé à plat avec un stylo spécial qui chauffe le filament. « C’est comme une imprimante 3D sauf qu’on dessine à la main. Le séchage est instantané alors le geste doit être précis et minutieux », poursuit l’entrepreneur. Le résultat : « des pièces manufacturées » qui pèsent à peine une centaine de grammes, faciles à accrocher au-dessus du canapé.
Aujourd’hui, deux artistes s'entraînent à manipuler le stylo. « Quand un modèle nous plaît, on en fait une petite série d’une cinquantaine de pièces numérotées », détaille l’un des dessinateurs. A l’exception de la réinterprétation de la danseuse de Degas, toutes les œuvres sont originales. Vendues entre 50 et 120€ sur le site d’Octopode, leurs créateurs espèrent en écouler un maximum pour Noël. « Notre ambition, c’est d’être un jour en rupture de matière première », conclut avec humour Christophe.