« La nuit venue on y verra plus clair », le docu qui dénonce les violences sexistes et sexuelles dans les clubs

C’est dans la pénombre des clubs (de musique) que se déroule parfois les pires comportements de prédation. Dans cet espace dédié à la fête et à l’abandon de soi, où se mêlent alcools et drogues, les agressions sexistes et sexuelles sont souvent pratiquées sans même en avoir conscience. Constatant une quasi-absence de documentation sur le sujet, Rayane Malki, Thomas Restout et Marion Delpech profitent de la mise à l’arrêt de la fête pour se saisir de la question. Un an plus tard né « La Nuit venue, on y verra plus clair », un documentaire qui met en lumière avec beaucoup de justesse la condition féminine dans les sphères des musiques électroniques, que ce soit sur le dancefloor ou dans les milieux professionnels. Rencontre au sommet (chez Le Sacré Club), avec Marion et Rayane.
  • Si les mouvements de libération de la parole ont fait sauter de nombreuses digues du patriarcat et contribué à faire du « respect » l’une des valeurs cardinales de notre société, il reste encore de nombreux secteurs où les pratiques méritent d’être questionnées et déconstruites. C’est notamment le cas dans le domaine des musiques électroniques, que ce soit du côté des publics ou des professionnels.

    Bien que #MusicToo – la dénonciation des violences sexistes et sexuelles dans l’industrie de la musique – soit passée par là, peu de voix se sont faites entendre dans cette sphère, souvent mise à l’écart. Il n’est pas encore aisé d’avoir l’entière liberté de dire ce que l’on ressent, ce que l’on vit et ce que l’on ne souhaite plus. Très rapidement, pour Marion (membre de PWFM, Act Right & Technopol), Rayane Malki (auteur et co-réalisateur du documentaire, co-fondateur du Bruit de fond) et Thomas Restout (réalisateur), les sujets se sont croisés.

    Le premier, c’est l’insécurité et les violences qui existent dans l’obscurité des dancefloor. Sujet de notre entretien avec ces derniers, ils nous racontent. Des mains au cul aux frotteurs en passant par le fléau du GHB : « Souvent les femmes, en tout cas, sur une piste de danse sont considérées comme des objets sexuels, des proies. » nous confie Marion. Ils fixent du regard, voient dans certaines danses des appels à la séduction et n’acceptent pas les refus. Elle ajoute « T’as une proie et un prédateur qui attend de repérer une nana, généralement toute seule dans un coin sombre. »

    Pour pallier ces problématiques, certains clubs décident de repenser leur architecture. Des spotlight sont installés dans les coins les plus sombres, des « safe zone » émergent et les organisateurs tendent à être mieux formés, plus sensibilisés. Mais le plus important reste la nécessité d’intégrer la notion de consentement, quelle que soit l’heure ou la quantité d’alcool ingurgitée « Normalement le consentement, c’est important de le préciser, doit être oral. C’est vrai que c’est compliqué pour les gens mais tant qu’il n’y a pas de grand oui c’est non ».

    Le second sujet, traité dans la seconde partie du documentaire, concerne la sphère professionnelle. Les violences subies par les artistes, techniciennes, bookeuses, communicantes et toutes les autres « ayant été pendant des années soumises à une loi du silence. » A cela s’ajoute la question de l’accès des femmes aux métiers techniques. Il est encore bien trop rare de voir une ingénieure du son s’occuper d’un festival ou d’un lieu. Même constat pour le métier, pourtant davantage dans la lumière, de DJ. Les femmes restent encore trop souvent cantonnées « à des rôles précis comme la communication, le graphisme ou le bar. »

    « La Nuit venue, on y verra plus clair », offre l’opportunité de prendre conscience et penser ces problématiques dans leur globalité. Avec des témoignages au plus près des concerné.e.s, il ouvre les yeux sur la reproduction de comportements, qu’ils aient lieu sur les dancefloor ou dans les couloirs des labels, ancrés depuis bien longtemps et ouvre la voie vers une société où « à force d’actions et d’éducation, la nuit venue, on y verra plus clair. »

    La première diffusion du documentaire aura lieu au MaMa Festival le 13 octobre de 11h à 12h30 au sein du FGO Barbara. Il sera également en tournée, tout l’hiver, au sein de festivals & établissements scolaires et sera disponible courant 2022 sur les internets.

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