égalité salaires hommes-femmes

Les femmes peuvent enfin consulter les fiches de paie de leurs collègues masculins

Une récente décision de justice a ouvert cette possibilité afin de pouvoir condamner plus facilement les entreprises qui dérogent à l’égalité salariale femme-homme imposée par la loi.
  • Après son licenciement, une employée du secteur de la finance a récemment découvert qu’elle avait été moins bien rémunérée que ses collaborateurs masculins d’alors qui exerçaient la même fonction. Or le code du travail est clair : un employeur doit assurer « pour un même travail ou pour un travail de valeur égale, l'égalité de rémunération entre les femmes et les hommes » Elle a donc engagé une procédure aux prud’hommes et son avocat a demandé à l’employeur de prouver qu’il ne discriminait pas les femmes, et ce en présentant des bulletins de salaires d’employés du même échelon de responsabilité mais… masculins.

    Refusant de dévoiler des informations jugées confidentielles quant à la vie privée de ses employés, l’entreprise s’est pourvue en cassation. La cour suprême a étudié le dossier et statué le 8 mars 2023 : la défense de “l’égalité de traitement entre hommes et femmes en matière d’emploi et de travail" justifiait cette demande et l’employeur dut produire la preuve de sa bonne foi…

    L’ex-employée a finalement obtenu gain de cause. Or une décision de ce niveau ne concerne pas qu’une seule affaire : elle fait jurisprudence, ce qui signifie que tout futur plaignant ou plaignante pourra exiger la même chose. Et des affaires d’inégalité, ce n’est pas ça qui manque en France.

    15 % d’argent en moins. Bien qu’inscrite dans la loi depuis décembre 1972, “l'égalité de rémunération entre les femmes et les hommes” est loin d’être la norme. Le dernier rapport de l’INSEE sur ce sujet le démontre encore : “En 2021, les femmes gagnent en moyenne 14,8 % de moins que les hommes en EQTP” (en équivalent temps plein, car les Françaises sont souvent employées à des postes avec un volume horaire réduit). Sur un SMIC mensuel (soit 1 383,08 €), cela représente une perte nette de 204 € par mois pour une employée.

    Si l’organisme de statistique reconnaît qu’il y a une amélioration (en 20 ans, l’écart de salaire est passé de 28 % à presque 15 %), il reste des inégalités flagrantes. C’est particulièrement vrai dans les grands groupes et au sein des cadres. Mais dans le privé, pour un poste équivalent chez un même employeur, l’écart de salaire moyen en temps plein est encore 4,3 % inférieur pour les femmes selon l'INSEE. Et ceci bien que des sanctions existent…

    Briser le plafond de verre. En offrant plus de transparence, l’arrêt de la cour de cassation donne des moyens aux plaignantes de pouvoir confronter les entreprises fraudeuses en consultant et comparant les fiche de paie. Il y a de fortes chances que cela incite les entrepreneurs à éviter ce genre de manigances. Mais il y a aussi un risque : que les sociétés s’appliquent à ajouter de fines différences dans les fiches de poste qui compliquent la comparaison de postes “équivalents”, au détriment des employées.

    En cas de suspicion, les employées sont invitées à se tourner vers leur syndicat, s’il y en a un dans l’entreprise, ou vers des collègues. Une fois les éléments en main, il est conseillé de demander une confirmation et des explications aux ressources humaines. Si ceux-ci se montrent peu participatifs, vous pourrez alors vous tourner vers l’Inspection du travail, seule habilitée à enquêter et établir une mande (PV) en cas de discrimination liée au genre.

    Quant à ceux qui craignent encore que cette avancée divulgue des informations sensibles, la cour de cassation a précisé dans son arrêt que les bulletins présentés devront cacher toute donnée personnelle en dehors des noms, prénoms, classification conventionnelle, et les rémunérations brutes mensuelles et cumulées (par année civile). Alors, qui a peur de la transparence ?

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