Les micro-algues, le nouveau piège à CO2

Dans les océans, depuis 2 milliards d’années, les micro-algues consomment plus de 30% du CO2 terrestre. C’est un formidable piège pour les gaz à effet de serre en partie responsables du réchauffement climatique. D’où l’idée de plusieurs industriels français de les utiliser aussi sur la terre ferme pour purifier l’air.
  • Un gros matou avec un costume de super héros en collants bleus, slip et chaussettes rouges, coiffé d’un chapeau : c’est l’étrange animal découvert par les élèves d’une école élémentaire de Poissy, dans les Yvelines, à la rentrée de septembre. Ce chat est l’œuvre de Zdey, artiste français de street art à l’univers très pop et coloré. Il est tagué sur une imposante machine de cinq mètres sur trois installée dans la cour de récré. Développée par Suez, cet étrange appareil produit une « bulle d'air pur » générée par des micro-algues naturelles. Elle capte l'air à hauteur d'enfant -là où il est justement le plus vicié- avant de le « dépolluer » et de le recracher. « C’est un filtre à particules qui épure l’air pollué, les poussières et l’oxyde d’azote », précise Pierre Heurtaux, chef de projet chez l’industriel français.

    Un écosystème ingénieux et vertueux
    Le processus est plus complexe que celui de la nature. En plus des algues, il faut une source de carbone, de l’azote et du phosphore, des éléments minéraux, de l’eau et de la lumière qui apporte les photons. Cette photosynthèse conduit à la production de biomasse et d’oxygène. « Le dosage de la lumière sur les algues nous permet de réguler leur production. Leur croissance est très rapide : ces micro-organismes unicellulaires se multiplient toutes les heures, détaille Pierre Heurtaux. Une fois le trop-plein de l’aquarium à algues atteint, on en récupère une partie via un robinet pour en faire des bio pesticides ou des bio stimulants pour l’agriculture. » Un écosystème qui est donc aussi ingénieux que vertueux.

    Suez n'est d’ailleurs pas la seule grande entreprise présente sur ce créneau. Veolia, ArcelorMittal ou encore Total développent aussi des projets similaires. L’enjeu est vital puisque la pollution de l'air intérieur et extérieur cause chaque année 6,5 millions de décès selon l'Organisation mondiale de la santé.

    « Nous sommes en période de test pendant 1 an, pour voir comment ce qui fonctionne très bien en laboratoire va s’adapter au contexte urbain, aux changements de températures et de lumière »

    Des aspirateurs à particules fines
    À Toulouse, pas de matou mais un «arbre algal », installé sur les nouvelles ramblas de la Ville rose et qui joue aussi le rôle d’aspirateur à particules de dioxyde de carbone. Haut de cinq mètres, il réduit les polluants atmosphériques qui proviennent de l’usure des pneus ou des pots d’échappement. « Le challenge pour nous était d’intégrer cet objet dans l’espace urbain. Après une concertation citoyenne, les toulousains ont demandé l’utilisation de matériaux organiques pour sa fabrication : ils souhaitaient pouvoir voir les algues dans leur aquarium de l’extérieur et que l’arbre soit habillé de bancs en bois », raconte Vinh Ly, le fondateur de Kyanos, une start-up spécialisée dans la production de micro-algues en laboratoire.

    L’objectif de cet «arbre algal » : capter autant de CO2 qu'une centaine de véritables arbres et purifier près de 200.000 m3 d’air par an. « Nous sommes en période de test pendant 1 an, pour voir comment ce qui fonctionne très bien en laboratoire va s’adapter au contexte urbain, aux changements de températures et de lumière », poursuit Vinh Ly. Et si l'expérience est concluante, on pourrait bien voir ces ces arbres "magiques" pousser dans toutes nos villes pour les aider à mieux respirer.

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