Comment le racisme et les violences policières ont bouleversé les Oscars 2021

Le réalisateur et scénariste afro-américain Shaka King était en lice pour l’Oscar du Meilleur film, avec « Judas and the Black Messiah ». Au final, l’histoire de Fred Hampton, merveilleusement bien interprétée par Daniel Kaluuya, aura valu à ce dernier l'Oscar du meilleur acteur dans un second rôle. Mais des films comme « Les Sept de Chicago » et « Billie Holiday, une affaire d’État », ont secoué les Oscars, plus engagés que jamais par leur sélection. Le cinéma, reflet de la réalité ?

L’année de la diversité

Alors que les femmes ont été davantage visibles cette année dans les nominations (on pense à Chloé Zhao, repartie avec l'Oscar de la meilleure réalisatrice), qu’en est-il des autres récompensés ? Un acteur, Daniel Kaluuya, porte sur ses épaules le rôle d’une première victoire d’artiste non blanc dans les quatre catégories récompensant les acteurs. Dans Judas and the Black Messiah, film sensation réalisé par Shaka King, Daniel Kaluuya incarne Fred Hampton, un jeune leader des Black Panthers dans les années 1960. Ce film, grand favori, fait écho à la situation actuelle aux États-Unis, entre racisme et violences policières. Via cette tragédie, on retrouve tout ce qui agite la société américaine depuis plusieurs mois : les violences policières à l’égard de la communauté noire, l’action et les manifestations, les mouvances apolitiques et revendications à l’égard du pouvoir en place. Plus que jamais, ce film qui se situe dans les années 1960 s’approche de notre société actuelle, en combats et témoignages. Son réalisateur lui-même s’en explique : "notre but était de faire un film qui capture l'esprit de 1968. Mais ça a tellement peu changé entre 1968 et 2021 que nous n'avons pas vraiment eu besoin de faire de parallèles", dixit Shaka King.  

Le cinéma s’empare de la réalité

Avec les émotions, les messages passent. Ce que le cinéma fait depuis ses débuts, c’est de digérer ce que la société vit, dénonce, pointe du doigt. Et en matière de racisme, des films comme Le Sergent Noir de John Ford, Black Panthers d’Agnès Varda, Cotton Club de Francis Ford Coppola, Do The Right Thing de Spike Lee, Gran Torino de Clint Eastwood, Loving de Jeff Nichols ou encore Get Out de Jordan Peele sont de fabuleux exemples de longs-métrages qui s’attaquent au racisme via une histoire touchante, au plus près de nos sentiments, bouleversante aussi. Les Oscars, vitrines du monde, ont changé leur fonctionnement en 2021 avec des nominations incluant des minorités ethniques dans ses catégories. Citons Steven Yeun, Américain d’origine asiatique, et deux femmes réalisatrices pour le Meilleur Réalisateur. Mais aussi dans la sélection de films comme Judas and the Black Messiah, cette année, ou Green Book de Peter Farrelly, Oscar du meilleur film en 2019, BlacKkKlansman de Spike Lee, Oscar du meilleur scénario la même année. Ce que l’on entend, et qui s’accentue en 2021, c’est le besoin de plus de diversité au cinéma, plus de réel aussi.

Acteurs et actrices du réel

L’acteur le plus emblématique de ce changement est sans doute Michael B. Jordan dans Fruitvale Station, de Ryan Coogler. Janvier 2009, Oscar Grant, à seulement 22 ans, est la victime noire d’une bavure policière dans une station de métro. Sensation à Sundance avec un prestigieux Prix du Jury, le film peut être mis en parallèle avec Judas and the Black Messiah. Deux hommes noirs qui ont existé, assassinés tous les deux, et avec le parti pris de réalisateurs concernés, voire engagés. Le cinéma, la nouvelle forme d’action ? En tout cas, il n’a pas fini d’être moteur dans les débats concernant les violences policières et le racisme, deux problèmes hélas encore très actuels.

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